Au XXe
siècle
En 1828, la Société Métallurgique
d’Engis
avait été créée pour
l'exploitation des
gisements de zinc régionaux ; elle est devenue, par fusion
avec
d'autres entreprises, la société de la Nouvelle
Montagne
qui, après la découverte de gisement de phosphate
en
Hesbaye, va se mettre à fabriquer aussi des engrais
chimiques et
devenir le groupe mondial Prayon. Son charbonnage de Bon-Espoir lui
procure des bénéfices considérables
mais, au
tournant du siècle, un changement de direction provoque une
modification des investissements et une baisse salariale pour les
ouvriers de 3 francs par jour. S'en suit une grève de plus
d'un
mois et demi dont on discute au Parlement car sept
grévistes - dont deux Engissois -, n'ayant pas
accepté
l'autorité d'un porion violent (d'ailleurs
déjà
condamné à une trentaine de condamnations
diverses) et
accusés par lui, sont arrêtés chez eux
à 6 h
du matin, le 5 juin 1901, bien que les bourgmestres d'Engis et des
Awirs, M. Plumier et M. de Clerx d'Aigremont, aient refusé
de
requérir la gendarmerie ; garrottés (et
même
pour l'un d'eux enchainé), ils sont conduits à la
gendarmerie d'Engis puis à Liège où
ils subissent
dix jours de détention préventive… [Demblon].
Le 13 juillet 1861, le Conseil provincial de Liège
avait débattu
d’une demande de scission des communes de Saint-Georges et de
Hermalle car la Mallieue désirait être
rattachée
à Flône. L’un des enjeux
était
l’école : il n’y en avait pas sur
la rive gauche
et les enfants de la Mallieue devaient passer la Meuse quatre fois par
jour, par bac, pour se rendre sur la rive droite, à
l’école d’Hermalle…
Chacun,
d'ailleurs, devait faire de même, s'il devait aller d'une
rive
à l'autre, que ce soit pour se rendre au travail ou
pour prendre le
train.
De cause
à effet, l’instauration d’un passage
d’eau.
La
barque
suivait un câble accroché aux poteaux.
Que
la
Meuse soit calme ou impétueuse,
Il
fallait
la passer, même par vagues dangereuses.
Gustave
Séverin, Souvenirs
(La rue de la Meuse)
Carte
postale représentant le château et la cour
d'honneur, adressée d'Engis en 1903.
Un projet de passerelle en fer, élaboré en 1894,
n'aboutit pas. En mars 1904, le député de
Huy-Waremme rappelle à la Chambre :
J'ai,
en second lieu, à réclamer du gouvernement un
autre
travail d'une utilité non moins grande ; je veux parler de
la
construction d'un pont sur la Meuse, sur le territoire de la commune de
Hermalle-sous-Huy.
Cette
importante commune est coupée en deux tronçons
par la
Meuse. La partie la plus considérable de la commune, ainsi
que
les communes environnantes situées sur la rive droite de la
Meuse, sont sans communication avec les usines de la rive gauche et le
chemin de fer du Nord-Belge, sis sur cette rive.
Ces
communes, parmi lesquelles je citerai, outre Hermalle-sous-Huy,
Clermont-sur-Meuse et Saint-Séverin ont une population de
plusieurs •centaines d'ouvriers qui, journellement, matin et
soir,
doivent traverser la Meuse en barquette pour se rendre aux usines de la
rive gauche, depuis Flône jusqu'à
Liège, et, depuis
Flône jusqu'à Huy. Il y a, en outre, en moyenne,
une
centaine d'autres personnes qui, quotidiennement, circulent d'une rive
à l'autre; ce qui fait environ 600 passagers par jour. -
En
cas d'inondation et de fortes pluies ou bien lors du chômage
de
la Meuse, ce qui représente, au total, une moyenne de 60
jours
par an, les malheureux habitants de ces communes sont
obligés,
soit de rester chez eux, soit de déloger, soit de faire le
matin
et le soir un détour de plusieurs lieues pour rejoindre
l'autre
rive par les ponts d'Ombret ou d'Engis. Il existe sur le territoire de
ces communes des richesses inexploitées et inexploitables
par
suite de l'absence de communications, notamment des
carrières,
qu'un pont mettrait en valeur.
Dois-je
insister sur les difficultés d'approvisionnement pour les
habitants et les cultivateurs de ces communes
déshéritées? C'est à grands
frais qu'ils
sont obligés d'aller prendre leurs marchandises ou
expédier leurs produits aux gares d'Ombret et d'Engis !
Enfin,
au point de vue spécial de la commune de Hermalle, sa
séparation par un obstacle difficilement franchissable,
entrave
et gêne les divers services publics, tel que
état-civil,
sépulture, service du culte, fréquentation des
écoles, etc.
Les efforts conjoints des
autorités communales et du député de
Huy-Waremme
aboutissent enfin au projet d'un pont construit en béton
armé, pour des raisons de cout et de rapidité ;
le
travail se fait en cinq mois (1908-1909).
Photo parue dans la revue Le Béton
armé, 1911.
« Examinons
le côté économique du
problème et les
raisons qui, dans le cas considéré, ont fait
préférer un pont en béton
armé à un
pont métallique.
Le pont de Hermalle-sur-Huy et le raccordement sur la rive
droite
au chemin reliant le village au passage d'eau n'ont
coûté,
tout compris, que 205.800 francs. Déduction faite du prix de
la
rampe, qui est évalué à 20.600 francs,
le
coût du pont proprement dit serait de 179.200 francs, soit
par
mètre carré 222 fr. 60, y compris les supports,
le pavage
de fa chaussée et des trottoirs.
Un pont à travées
métalliques du type poutre
droite, qui semble le plus économique dans le cas actuel
reviendrait, toute chose égale d'ailleurs, sensiblement
à
240 francs le mètre carré, en
réalisant la
charpente métallique et les pavages seulement.
Il faudrait, en outre, ajouter le prix des supports en
maçonnerie (béton avec parements en pierre)
40.000 francs
en moyenne pour les piles en rivière et 15.000 francs pour
les
culées, ce qui, au total, donnerait une dépense
de 240 x
805 + 40.000x2 + 15.000x2 = 303.200 francs en supposant le pont
composé de trois travées.
Il y aurait donc, d'après ces calculs une
augmentation de
dépenses de 124.000 francs environ pour
l'établissement
d'un pont métallique.
On pourrait ajouter à cette raison que les ponts
en
béton armé offrent sur les ponts
métalliques
l'avantage d'un entretien moins onéreux.
Un pont métallique, à poutre droite, ne
présente pas à la vue la même harmonie
de lignes
qu'un pont en arc et en béton armé.
Un pont métallique, à poutre droite,
n'aurait pas permis de donner au pont son tirant d'air maximum.
Il
aurait nécessité des culées plus
élevées et par conséquent des rampes
d'accès à inclinaison plus forte.
Un pont métallique à arcs ou suspendu
ne
présenterait pas cet inconvénient mais le prix
d'exécution en serait plus élevé
encore.
Un pont en béton armé est plus
rapidement
construit. Celui de Hermalle-sous-Huy le fut en 5 mois ; un pont
métallique avec supports en maçonneries aurait
nécessité beaucoup plus de temps.
Résistance.
— Les épreuves auxquelles on soumet les ponts en
béton armé montrent que ces ouvrages sont
très
rigides. Au moment des épreuves, le pont de Hermalle fut
chargé à raison de 400 kilogrammes par
mètre
carré, on fit rouler ensuite une charge de 70 tonnes sur cet
ouvrage d'art.
Les flèches mesurées pendant ces
épreuves
furent à peine de quelques millimètres et le
recul des
culées inappréciable.
Ces flexions minimes furent élastiques et
momentanées. »[Béton
armé]
La « charge
roulante » a été constituée
de locomotives
de 30 tonnes sur 3 essieux et wagons de 14 tonnes sur 2 essieux.
Il faut aussi noter
que
c'est le deuxième pont de ce type construit sur la Meuse -
le
premier le fut à Rouillon (Annevoie) en 1905 - et
que l'utilisation du béton armé pour un pont
n'existe
alors que
depuis une dizaine d'années.
Scaphandrier et ouvriers à Hermalle
- coll. BMG
Des scaphandriers ont été nécessaires
pour déraser
le lit du
fleuve, enlever des poches de gravier et placer les sacs de
béton à la base des deux caissons.
L'inauguration du pont donne lieu à de fastueuses
cérémonies en
présence de la famille de Potesta,
du bourgmestre Diesmans et des autorités communales. Les
journaux hutois en font le reportage :
«
(…) Le
cortège se remet en marche pour faire à
travers les deux parties de la commune, La Mallieue et Hermalle
réunies, une promenade triomphante. Des terrasses
de la gare, on peut assister au spectacle du
défilé de cet innombrable
cortège. Les cavaliers sont
déjà aux portes du château que le
dernier groupe est encore sur le terrain de la gare. Le pont
et le village sont décorés de drapeaux, de
guirlandes et de fleurs. Le pont était remarquable
par sa décoration de drapeaux nationaux et du
Congo. La soirée était superbe et la
foule massée (plus de 10 000 personnes) sur les deux rives
put admirer l'éblouissant feu d'artifice. Le
bouquet représentait le pont de Hermalle avec en lettre de
feu Hermalle, le 11 juillet 1909. »
Le malheur marque cependant le reste des 50 premières
années…
Et d'abord la Première Guerre mondiale qui amène
comme partout son lot de
souffrance.
En 1914, une jeune fille préserve
pourtant le village :
«
La scène se passe à Hermalle-sous-Huy, petit
village des bords de Meuse, à quatre ou cinq
kilomètres en aval de la cité mosane.
Nous sommes en aout 1914.
Au
sud du village dominé par le bois d'Hermalle, un coin
paisible, la Trihette. Quelques modestes demeures
campagnardes s'y échelonnent le long du chemin conduisant au
bois qu'il traverse pour atteindre Aux Houx, une sorte de
lieu-dit. Marie habite avec ses parents et son
frère une maison longue et basse perpendiculaire au chemin.
Soudain,
une
voisine, brave femme qui habite une humble bâtisse juste
avant le bois, fait irruption, hors d'haleine, dans la
cuisine. « Mademoiselle, hoquète-t-elle
à Marie, venez un peu. Il y a chez moi des soldats
et je ne comprends pas ce qu'ils veulent. »
Devant
le
trouble évident de la pauvre femme, Marie
n'hésite pas et toutes deux courent à toutes
jambes vers la maison du haut du chemin. En effet, il y a
là quelques cavaliers armés, coiffés
de curieux casques et vêtus de gris.
Immédiatement, Marie, qui termine l'école
moyenne, reconnait la langue allemande. « Ils ont
soif, dit-elle à la femme apeurée, et demandent
de l'eau pour eux et pour leurs chevaux. Donne-leur
à boire ».
Une
fois désaltérés, les cavaliers
remontent en selle et reprennent le chemin du bois par où
ils étaient venus.
Le
lendemain ou le surlendemain, c'était l'invasion. Toutes
à leur élan, les armées allemandes
submergèrent la contrée. Une troupe
s'arrêta à Hermalle pour y prendre
position. L'officier qui la commandait s'en fut trouver le
bourgmestre afin de régler des problèmes
d'installation. « Monsieur le Bourgmestre, dit-il au brave
homme éberlué, comme nos éclaireurs
ont été bien accueillis, vous pouvez
être tranquille, il ne sera rien fait à votre
village ».
D'heureux
effets
parfois… pour de bien petites causes !
Marie
Maréchal
(†), récit recueilli par son
neveu, Léopold Maréchal. »
Maréchal,
Léopold, Comment
Marie Maréchal sauva son village Hermalle-sous-Huy en 1914,
revue Le Guetteur wallon,
1994, 4, p 175. Nous communiqué par les Archives
de l'État de Namur en mars 2007.
Aout 1914…
Le 1er, la garde
civique liégeoise est arrivée
par train pour garder ce pont de Hermalle qui a cinq ans. Les hommes
sont logés dans des bâtiments
réquisitionnés, sur de la paille. Le
sous-lieutenant Léon Mélotte
a décrit le corps de garde :
«
Quelle masure ! Quel délabrement ! Il fallait aller vite ;
on
a occupé le premier bâtiment sous la main. Parmi
les marches branlantes, les murs lézardés, les
plafonds croulants, où d'énormes
araignées courent, les hommes ont jeté leur
paille. On entrera là-dedans que s’il pleut ;
l'odeur est
trop infecte. Cela sent la moisissure, le fumier et les rats
dérangés fuient de tous
côtés. »
Les officiers ont droit à une chambre à l'auberge
ou chez l'habitant.
Le 2, l'Allemagne adresse un ultimatum à la Belgique.
Le 3, la garde arrête un individu qui a tenté de
passer inaperçu en se jetant dans le fossé qui
borde le chemin. C'est un Allemand !
Le 4, la garde est remplacée par l'armée.
Pont
de Hermalle en aout 1914. À
l'arrière-plan la Tour Malakoff – photo offerte
par Georges Plumier † – coll. BMG
Dans la nuit du 4 au 5, le lieutenant du génie Beaupain
obéit aux ordres de l'armée belge et, vers 4
heures [Leman],
fait sauter le jeune
pont de Hermalle… Un pont qui ne sera reconstruit
(quasiment à l'identique) qu'en
1923-1924 … pour être miné par
le
génie belge le 11 mai 1940 et reconstruit
péniblement en
1947-48 - péniblement, car l'effondrement d'une arche en
septembre 1947 va provoquer la chute de 12 travailleurs dans le fleuve
et 7 y perdront la vie.
Plusieurs Hermalliens, faits prisonniers par les Allemands, passent par
le camp d’immatriculation et de transit de
Gießen ;
parmi
eux, le receveur communal Camille Lecrenier, honoré ensuite
par
l’attribution de son nom à la rue de la
Héna.
Une femme joue un rôle majeur à Hermalle mais
disparait dans les oubliettes de l'Histoire hermallienne…
Marie Ladry :
Née à
Saint-Servais (Namur) le 15 juillet 1869, Marie Ladry arrive le 9
octobre 1910 à Hermalle-sous-Huy venant de Messancy (province de
Luxembourg). Selon le registre
de la population de Hermalle, elle exerce la profession de «
gouvernante ».
Elle a été engagée comme préceptrice du
jeune René de Potesta, fils héritier du baron
Édouard de Potesta décédé en 1911 à
l'âge de 43 ans, et d'Isabelle de Géradon qui va assurer
la gérance des biens familiaux. Durant le premier semestre de
1914, la baronne Isabelle se rend à Gand d'où sa famille
est originaire et elle confie la garde du domaine hermallien à
Marie Ladry. Celle-ci est alors âgée de 45 ans.
Marie Ladry commence à rédiger un journal le 13 aout
1914, jour où les Allemands envahissent le village. Elle va
noter quasi quotidiennement les évènements afin de
pouvoir transmettre ultérieurement des informations
précises à sa patronne et justifier ainsi ses propres
décisions en tant que régisseuse.
On y trouve des renseignements directement relatifs au château
mais aussi d’autres qui concernent le village et la région
et complètent les données recueillies par les historiens.
Ses informations, vérifiées par nous pendant des mois,
s'avèrent exactes à plus de 90 %. Le pourcentage
restant n'en est pas pour autant inexact : simplement, nous n'avons pas
réussi à les rattacher à des faits connus.
Le journal démontre que le comportement et les décisions de Marie pendant la 1 ère année
de la guerre ont contribué à maintenir calme et relations
courtoises avec l’envahisseur, allant parfois
jusqu’à inciter celui-ci à alimenter le personnel
du château – un comportement rarissime de l’occupant
lors d’une invasion caractérisée par le pillage
généralisé.
Il est évident que Marie Ladry, par sa maitrise
d'elle-même vis-à-vis d'un envahisseur qu'elle
exécrait, pour son attitude posée, par son
éducation et son intelligence, a réussi à
établir un climat serain propice à la mise en confiance
et au respect de l'occupant.
Elle a aussi protégé le personnel du château,
soit de la vindicte de certains villageois par exemple vis-à-vis
d’une villageoise d’origine allemande qui servit
d’interprète, soit d’un blâme de la baronne en
dissimulant dans son compte rendu l’arrestation du jardinier qui
fut traduit devant un Conseil de Guerre de campagne au prétexte
d’avoir conduit des soldats dans un guet-apens (qui
n’était autre que le local servant de réservoir
pour l’alimentation du système d’éclairage en
gaz éthylène).
En résumé, Marie Ladry a réussi à assumer :
- la gestion totale de la propriété : château, labours, vergers, bétail ;
- la gestion du personnel avec prise en compte des dégâts psychologiques ;
- l’accueil et la notation des visiteurs :
Allemands qui, pour passer le temps, viennent visiter les salons,
châtelains voisins qui viennent s’informer ou apportent des
nouvelles, civils fugitifs, etc. ;
- le relevé des nouvelles, vraies comme fausses qui circulent dans la région, pour mémoire ;
- les ventes de légumes, de vin, de
genièvre, de confitures, de piquets de sapin (pour la
restauration des ponts) aux Allemands, ce qui lui procure la
trésorerie nécessaire au paiement du personnel ;
- la notation quasi journalière du nombre
d’aéroplanes, dirigeables, camions, trains de soldats
comme de blessés, voitures mortuaires, voitures pleines
d’ouate, chariots pleins et vides – ce qui serait
considéré comme de l'espionnage par l'occupant s'il avait
découvert le carnet ;
- la mise à l'abri des biens précieux de la famille de Potesta ;
- la mise à l’abri du trésor de l’église dans la chapelle funéraire des Potesta ;
- l’expédition d’un colis et de 300 frs pour Gand, à sa maîtresse ;
- la mention de commentaires de soldats allemands qui se plaignent de la guerre et disent leur désir de rentrer chez eux ;
- la remise en état et la mise à disposition du manège pour l’exercice des cavaliers allemands et la grande fête qu'ils organisent ;
- la notation de l’état de santé de la population en fonction de la pollution atmosphérique et
- la gestion des litiges que celle-ci entraine ;
- la notation des attentats contre les Allemands ;
- la location d’une chambre et du billard
à un officier allemand… qui y reçoit des
demoiselles de la région ;
- la distribution de bons aux pauvres qui viennent aussi chercher chez elle du linge et des vêtements.
Le carnet s'arrête le 19 juillet 2015, jour du retour de la Baronne et de René de Potesta.
Marie Ladry quitte notre commune le 29 avril 1919 pour
aller à Hompré (Vaux-sur-Sûre). Plus personne ne se souvient d'elle à Hermalle.
|
Hermalle a vécu du bon et du mauvais avec cette guerre.
Le pardon d'un viol raconté par un réfugié belge en fait preuve :
« 32e témoignage : REFUGIÉ BELGE. À
Hermalle-sous-Huy, au mois de Septembre, j'étais sur la
place en face de la gare. Il y avait une escouade ou un peloton
de soldats allemands, sous les ordres d’un officier. Ils ont
placé un autre officier qui était avec eux contre un mur.
J'ai alors vu une femme, qui tient un café à Hermalle,
sortir et parler à l'officier responsable du peloton.
L’homme debout contre le mur opposé à la section a
ensuite été autorisé à partir. Le
frère de la dame m’a dit que l'officier placé
contre le mur avait violé la fille de sa sœur,
âgée d'environ 18 ans, et avait été pris en flagrant délit de viol de la deuxième fille, âgée d'environ 12 ans.
C'était la mère qui avait surpris l'officier en train de violer sa cadette.
Elle
a porté plainte auprès des officiers supérieurs
allemands et le violeur a été condamné à
être fusillé. C’est pour cela qu’on l’a
amené comme je l’ai décrit ci-dessus. La
mère était la dame qui est sortie, et le responsable de
la section lui a demandé si elle voulait pardonner l'officier
condamné. Elle ne voulait pas le voir exécuter et a dit
qu'elle pardonnait. Il a ensuite été
libéré. Le policier était habillé de gris
et avait un casque avec une pointe au-dessus. Il appartenait au 32e
Régiment de ligne. Je le sais parce que j'ai vu le nombre sur le
revêtement de toile qu'il portait sur son casque. Les autres
soldats présents sur la place appartenaient au même
régiment. »
Committee on alleged German outrages. Evidence and documents laid before the committee on alleged German outrages.
Being an Appendix
to the Report of the Committee appointed by His Britannic
Majesty’s Government and presided over by The Bight Hon.
Viscount Bryce, O.M. etc.etc. Formerly British Ambassador at Washington.
MacMillan Company, New York for His Majesty’s stationery Office,
London, appendix A, p.19
Le village est libéré par les Canadiens en 1918 ; des
familles hermalliennes les hébergent quelque temps avec plaisir.
Soldats canadiens hébergés en 1918 par Rosalie et Camille Feron. © Jean Mossoux.
La famille de
Potesta - II :
Pour
mémoire : Édouard
René Charles de Potesta
(Couthuin 17.08.1868-Hermalle 28.04.1911) + Isabelle Louise Julie de
Géradon (1873-11.1957) => Emma et René
Édouard Marie de Potesta
René
Édouard Marie de Potesta (Hermalle 22 juillet
1899-Hermalle 25 juin 1977)
Lorsque
les Allemands envahissent la Belgique au début de la
Première guerre mondiale, le jeune homme de 15 ans est
donc à
Gand avec sa mère.
À son retour à Hermalle en juillet 1915, il brule de
s'engager auprès des alliés et va finalement tenter de rejoindre
l'armée. Trahi par une sentinelle à la
frontière,
il sera emprisonné pendant un an à Anrath, avant
d’être transferé à
Celle-Schloss.
Isabelle Louise Julie de
Géradon assure, comme bien des épouses avant et
après elle, l'intérim de la direction de la seigneurie de
Hermalle.
Elle se heurte par exemple à la commune au sujet des
écoles que la famille a fait construire rue de meuse (actuelle
rue du Pont) à 300 m du château et publie la
réalité du problème :
René rentre à Hermalle
après la guerre. Il a 19 ans, il n'est pas encore majeur.
Menu du repas offert au
château de Hermalle au baron G. de Potesta de Waleffe - coll.
BMG M-I 0036
|
Il y a eu d'autres catastrophes que la guerre :
Les inondations étaient courantes. On se rappelle de celle
de
1910, de celle de janvier 1920 où la Meuse est
montée
jusqu'à 1,89 m au-dessus du quai d'Engis (photo de gauche,
remerciement à Charly Debatty) ; le même endroit
sera
également inondé en octobre 1924, en
décembre 1925
et en mai 1959, après un violent orage accompagné
de
grêle (photo de droite).
En janvier encore mais en 1926, suite à des pluies
torrentielles, le fleuve
déborde et inonde complètement le quartier
Chaumont de Hermalle ; on sauve les gens mais pas la
totalité du
bétail.
La Meuse
autrefois était bien différente ;
Peu
draguée, elle devenait facilement envahissante.
Des
crues terribles sont restées en mémoire.
Celle
de janvier 1926 aura marqué l’histoire.
L’eau
monta très vite, créant une vraie crise.
Chaumont
était devenu comme un quartier de Venise.
Quelques
audacieux devinrent des marins improvisés.
Il
fallait ramer pour garder le cap vers les sinistrés.
La
ferme Orban devait souffrir davantage.
Le
bétail, lui, ne pouvait monter à
l’étage.
Bravant
les périls, on parvint à sauver
l’essentiel,
Devant
ce cataclysme, on implorait la clémence du Ciel.
Gustave
Séverin, Souvenirs
(Mon Chaumont d’autrefois)
Engis est envahie ! L'eau atteint la rue
Maréchal Foch, quasiment au sommet de la rue de la
station...
soit une hausse de quelque 6 mètres !
Et
surtout…
« Messieurs,
le vendredi 5 décembre 1930, à Engis, par un
temps couvert et froid, une ménagère d'une
soixantaine d'années vaque à ses occupations,
sort de sa maison, ressent brusquement à la gorge une
insoutenable brûlure et immédiatement
après une sensation d'étouffement. Elle rentre
chez elle, s'alite, et meurt quelques heures après.
Ce
fait ne reste pas isolé. Des centaines et des centaines
d'hommes, de
femmes, d'enfants, habitant la vallée de la Meuse ressentent
les mêmes
symptômes, sont victimes du même mal inconnu.
Soixante-douze d'entre
elles meurent dans les 48 heures; plus de 300 échappent
à la mort mais
conservent en elles les traces du mal. Des centaines de bêtes
à cornes
sont brusquement frappées de mort dans les
étables.
Les
morts habitaient les communes de Hermalle-S-Huy, Engis, La Maillieu [sic],
Flémalle-Grande, Flémalle-Haute, Vierset [sic],
Ivoz-Ramet, Seraing, Jemeppe,
Ougrée. »
Archives
de la Chambre, au 7 juillet 1931, interpellation du
député Jacquemotte.
De fait : du 1er au 5
décembre 1930, un épais brouillard s'étend sur
l’Angleterre, la France, la Belgique causant de multiples
accidents d'aviation, de train, de voitures.
Il règne particulièrement sur toute la vallée mosane, de
Jemeppe-sur-Meuse à Huy. C'est un brouillard tellement épais qu’à Engihoul, on ne peut plus voir
quelqu’un à côté de soi pendant des heures, un air visqueux, une odeur
âpre qui brule la gorge, fait tousser et cracher noir ou jaune, sucré,
une poussière gris ardoise, grasse et collante.
Faute de pouvoir
soulager les bêtes, on met des bonbonnes d’oxygène dans les étables et
puis on doit les abattre pour qu’elles restent propres à la consommation.
Le jeudi, le brouillard épaissit encore et
s’étend sur des hauteurs jamais atteintes. Les gens continuent à
travailler des 11, 12 heures durant. Les usines ne s’arrêtent pas. Les
symptômes s’aggravent. Panique.
Ce brouillard fait stagner les particules fines et les gaz émanant des
27 grandes usines de la vallée qui utilisent, comme les particuliers, la combustion
du charbon.
Gens et animaux ne peuvent que les respirer.
Dès le troisième jour, de milliers de personnes
souffrent d'affection respiratoire et plus de soixante en
décèdent.
|
Extrait d'un article paru dans le New York Times du 6
décembre 1930.
|
L'émotion est intense non seulement dans la
région, mais dans la Belgique entière et
même dans le monde.
En témoignent les titres de journaux :
6
décembre
The Evening
Independent (U.S.A.) : "Mysterious fog in Meuse valley",
The Times (Angleterre) : "Over forty deaths in Belgium"
Sydney Morning Herald (Australie) : "Fog of death"
Rotterdamsch Nieuwsblad (Pays-Bas) : "De doodende mist"
7
décembre :
New York Times
: "Fog brought death only to old and ill" - sous-titre : "Peasants
still in terror"
Le Matin (France) : « Le brouillard fait des
victimes en Belgique »
Het Vaderland (Pays-Bas) : "De moordende mist"
8
décembre :
L’Humanité
(France) : « Un brouillard mortel descend sur neuf
villages
et tue près de 70 personnes »
Canberra Times (Australie) : "The breath of death".
9
décembre :
Les archives de Gallica.fr indiquent que le
quotidien français La Croix du 09 décembre 1930
(Numéro 14656) a écrit sous le titre «
Le
brouillard mortel dans la vallée belge de la Meuse
» : A
Hermalle-sous-Huy, on signale plus de 100 malades, mais il est
impossible de vérifier le chiffre.
«
Brouillard homicide », «
Vallée de la
mort »…
Le New York Times s'interroge : grippe espagnole,
arme chimique ou microbe du Sahara ? Il précise que
« 20 000 masques à gaz sont
acheminés
d'urgence de Londres à Bruxelles ».
Brouillard dans la vallée de la
Meuse - Collection Albert Humblet.
Une
hypothèse a effectivement surgi : le brouillard aurait
été contaminé
par la rupture de conteneurs contenant les gaz meurtriers
utilisés par
les Allemands durant la Grande guerre, conteneurs qui auraient souffert
d'un affaissement de leur lieu de stockage suite aux
périodes
d'inondations des années 1926.
Les journaux du nord de la France
relatent d'autant plus l'évènement que les
populations
civiles
françaises ont fortement souffert des gaz allemands et
qu'elles
ne peuvent donc que lire la presse avec
intérêt…
Mais il est
vrai que des rescapés, anciens combattants gazés,
ont établi la
comparaison entre la brulure ressentie dans les tranchées et
celle du
brouillard de 1930 [Prochasson].
Le 6 décembre, le procureur du Roi lance une enquête
sur
base d'une plainte
contre X et on crée une commission d'enquête
criminelle.
Le 7 décembre, la reine Élisabeth de Belgique
visite la
zone sinistrée et assiste depuis la maison communale d'Engis à un cortège funèbre.
Le Premier ministre Henri Jaspar présente les
condoléances du gouvernement lors d'une séance de
la
Chambre des représentants, et des parlementaires en
profitent
pour rappeler des incidents causés par des gaz industriels
à Havre, Frameries, Tilleur, Vilvoorde,
Willebroeck…
Le 12 janvier 1931, une commission est chargée
d'étudier l'application des dispositions légales
et règlementaires destinées à
prévenir les dangers résultant, pour
l'hygiène publique et pour le régime des eaux, de
l'exploitation des établissements insalubres.
Le
total des morts est de 60 selon la plupart des auteurs
récents
:14 pour Engis la plus touchée (sur 3759 habitants), 12 pour
Seraing (45133 habitants), 9 pour Jemeppe (13905 habitants) et
Flémalle-Haute (6074 habitants), 7 pour Yvoz-Ramet (3786
habitants), 5
pour Flémalle-Grande (5840 habitants), 4 pour Amay (6353
habitants) [Buijsman]
La consultation des archives de la Chambre, au 7 juillet 1931, donne
d'autres informations, rappelons-le : le député
Jacquemotte a cité 72 décès dans les
premières 48 heures, et le ministre de l'industrie,
du
travail et de la prévoyance sociale qui lui
répond, M. Heyman, n'a pas démenti pas
ces chiffres
: « plus
de soixante décès se sont produits. Il ne fut
constaté aucun cas de mort immédiate ou rapide.
L'action du brouillard s'est surtout manifestée par une
irritation des voies respiratoires, accompagnée de
complications diverses. »
Le quotidien français La
Croix du 9 décembre précise dans un
petit article en page 2 : «
À Hermalle-sous-Huy, on signale plus de 100 malades, mais il
est
impossible de vérifier le chiffre. »
Seuls les adultes ont été victimes : « il
n'y a pas un seul enfant atteint », ajoute La Croix.
Cortège funéraire rue
Wauters, Engis.
Mais il y a eu plus de 300 malades de longue durée. Et des
centaines de têtes de bétail morts sur place. À
Hermalle-S-Huy, Engis, La Mallieue, Flémalle-Grande,
Flémalle-Haute, Vierset, Ivoz-Ramet, Seraing, Jemeppe,
Ougrée.
Quant à l'indemnisation des victimes…, le
ministre
précise que 1/ le juge d'instruction a chargé des
experts
d'étudier les questions relatives à cette affaire
et
d'établir, éventuellement, les
responsabilités,
que 2/ il ne peut être question pour l'Etat d'intervenir dans
l'indemnisation des familles des victimes ou des personnes ayant subi
des dommages matériels.
Les articles 1382 et 1383 du Code civil prescrivent en effet que tout
fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage
oblige
celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer et que chacun est responsable du dommage qu'il a
causé, non seulement par son fait, mais encore par sa
négligence et par son imprudence. C'est aux tribunaux qu'il
appartient de se prononcer sur la question des indemnités
à allouer. Le problème, c'est qu'il n'est pas
possible de
déterminer qui est responsable…
Il y a pourtant longtemps que la pollution par les usines posait
problème !
En janvier 1860 a été imprimée par de
Thier et
Lovinfosse, à Liège, une plaquette
intitulée Réponse
par les principaux industriels en zinc de la Belgique à une
note
tendant à démontrer la prétendue
insalubrité des fabriques de zinc adressée par
MM.
Collette et Laport à la Chambre des Représentants
le 20
décembre 1859.
Les directeurs de la Sté de Corphalie, de la Sté
de
Colladios, de la Sté de la Vieille-Montagne, de la
Sté de
la Nouvelle-Montagne), des propriétaires de fabriques de
zinc
à Ampsin et Ougrée, des lamineurs de zinc
à
Longdoz, Liège et Chênée y
démontraient avec
moultes annexes que les usines de zinc n'étaient pas
responsables des cas de choléra que connaissait le pays de
Liège.
Et ils avaient raison puisque cette maladie contagieuse est due
à une bactérie et non… au zinc !
Mais certains témoignages, cependant, évoquent
cependant
des problèmes résultant des poussières
zinciques
déposées par les fumées des usines sur
les
herbages environnants, nuisant à la santé des
végétaux arborescents et des bestiaux.
Ces
affirmations furent évidemment battues en brèche
notamment par M. Pétry, vétérinaire,
membre de
l'Académie royale de médecine et de la Commission
provinciale d'agriculture :
« Il n'existe pas une seule
preuve claire, positive, que l'homme, l'animal, les prés et les plantes
annuelles
dépérissent ou meurent par l'action des fours
à
réduction de zinc. Des observations, des
expériences nombreuses, des ouvertures de cadavres, faites
par
des hommes compétents, n'ont décelé aucun
signe caractéristique,
démontré aucune
lésion morbide sérieuse,
qu'on puisse directement rapporter à un empoisonnement par
le
zinc ; comme on n'a pas prouvé davantage,
jusqu'à
ce jour, par l'analyse chimique, la présence de ce
métal
dans les entrailles des animaux, ou dans les différents
tissus
des végétaux. »
Carte
postale, 1ère
moitié du XXe
siècle
Avant la Guerre de 1914-1918, la famille de Potesta avait
cependant intenté un procès aux usines
à Zinc de
Flône
et des experts se déplacèrent à
Hermalle dans ce
cadre. Marie Ladry – préceptrice du
jeune baron de
Potesta et devenue, à cause de la guerre,
régisseuse du
château – a écrit dans son Cahier à
la date du 4 décembre 1914 :
« Abordant
un sujet local, disons que, les usines ne crachant plus leurs
fumées empestées, la santé
générale des hommes et des animaux s’en
ressent
malgré tout : un fermier, voisin de l’usine de
Flône, assurait qu’il voyait périr
quantité
de jeunes poulains, chose qui ne s’est pas produite cette
année. Des personnes souffrant de l’estomac voient
leur
état s’améliorer au point de vue de la
digestion. Depuis le mois de Juin
jusqu’à ce jour,
il n’y a eu qu’un seul décès,
et encore
était-ce un suicide ! Aucun malade !
»
Et le 4 juin 1915 :
« Les
Experts pour le procès des fumées sont venus hier
et
aujourd’hui. Ils avouent que le feuillage est beaucoup plus
beau
que les années précédentes.
» .
De fait, le journal La
Wallonie,
dans son article « Le mauvais brouillard » du 15
décembre 1930, signale la lettre envoyée deux
jours
auparavant par le Bourgmestre de Hermalle au directeur de la Commission
d'hygiène de la province de Liège pour faire
état
de la situation habituelle des habitants :
« Ces
plaintes concernent d'abord, de façon
générale, le
tort causé à la santé des habitants,
les ravages
produits dans la végétation et les maladies
occasionnées dans le bétail par les
fumées et les
émanations des diverses usines situées sur le
territoire
de notre commune ou voisine (sic)
de celle-ci : fours à zinc des
sociétés La Vieille
et la Nouvelle Montagne, briqueterie et cimenterie Dumont-Wautier
à la Mallieue, Hermalle et St Georges, produits chimiques
à Engis. Mais la présente
requête vise avant
tout la situation intolérable causée tous les
jours, dans
la matinée surtout par la société des
fours
à zinc de la Vieille montagne à Flône. [À ses abords] il s'agit
[…]
de traverser sur une étendue de plusieurs centaines de
mètres, un nuage opaque de fumée jaune,
chargée de
cendres qui brûle les yeux, oppresse la respiration, suscite
une
toux incoercible et va jusqu'à couper à certains
moments
la visibilité. […] Je
conclus, Monsieur l'inspecteur en demandant, au nom de mes
administrés et au nom de l'Administration communale […]
qu'une enquête sérieuse et impartiale soit faite
et que
des mesures efficaces soient exigées des usiniers pour les
obliger à annihiler ou tout au moins à amoindrir
dans de
très notables proportions les effets désastreux
que les
fumées et les émanations de leurs
établissements
causent à notre population. »
Cette
catastrophe et la commission d'enquête ont induit la
première étude
scientifique au monde sur la
mortalité et les maladies liées à la
pollution de l'air. Le pathologiste liégeois Jacques Firket
a dirigé une
équipe de médecins,
météorologues,
toxicologues et chimistes qui ont déterminé que
l'air froid
saturé de toxines a été
surplombé par une
couche d'air plus chaude qui l'a piégé
à une
hauteur de 80 m. C'était le smog…
L'étude a conclu que
«
Si les mêmes conditions se trouvent réunies, les
mêmes accidents se
reproduiront. (…) Si un
désastre survenait à
Londres dans des
conditions analogues, on aurait à déplorer 3 179
morts immédiates. »
Et cela s'est reproduit : on
attribue au brouillard de pollution qui a couvert Londres, du 5 au 9
décembre 1952, 12 000 morts «
excédentaires » entre décembre 1952 et
février 1953… [13]
Dans l'impossibilité où l'on se trouve
d'empêcher
le brouillard de se produire, l'effort demandé par les
autorités va se porter sur le contrôle des
émissions de gaz industriels, ce qui va prendre de
nombreuses
années ; en 1938, un parlementaire évoque encore
à
la Chambre les conditions dans lesquelles vit la population :
obligation en certains endroits de « garantir les yeux
»
pour pouvoir circuler, obligation de vivre portes et fenêtres
fermées sous peine de pouvoir en une heure à
peine
d'ouverture « avec le doigt, écrire votre nom sur
les
appuis des fenêtres, sur les parquets, sur les tables, sur
les
murs, partout », obligation de vivre dans cette
atmosphère empoisonnée alors même que
la plupart
des mineurs souffrent de pneumoconioses contractées par le
travail même dans les usines…
Près de
l'entrée de la maison communale d'Engis, une sculpture de
l'Engissois Paul Vandersleyen,
installée en décembre 2000, commémore
le drame environnemental de
1930 en évoquant une des toutes premières
victimes engissoises, la jeune Louise Dams.
L'inscription indique :
« Louise était jolie. Louise avait vingt
ans. Elle revenait du bal. Elle était une enfant…
À la mémoire de la soixantaine de morts, jeunes
et
âgés d'Amay, d'Engis, de Flémalle et de
Seraing,
victimes de l'accident atmosphérique de décembre
1930 dans la grande région engissoise.
Toute entreprise humaine, fût-elle industrielle, est
susceptible de perfectionnement ! »
Question : pourquoi le choix d’une jeune femme nue pour symboliser Louise ?
À peine arrivée de L!ège à Engis, elle a
gravi péniblement les quelques centaines de mètres qui la
séparaient de la maison familiale. On l’a
alitée, le médecin a fait « une
piqure » pour la soulager des douleurs respiratoires. Du feu
dans la poitrine. Il ne savaitit ce qui se passait mais a dû
intervenir chez d’autres pour les mêmes symptômes.
À l’aube du vendredi, Louise est décédée comme beaucoup d’autres.
Elle n'a pas eu le temps de pleurer sur son sort !
Le Bourgmestre dont la lettre a été
citée ci-dessus est Lambert Lepage depuis 1921.
Le 1er janvier de
cette année-là, un nouveau Conseil communal a
été installé.
Pour la première fois, tous les citoyens mâles
âgés
de 21 ans ont pu participer aux élections, selon le principe
« un
homme, une voix ». Les socialistes ont obtenu la
majorité.
Lambert Lepage a été nommé
bourgmestre, avec autorisation
exceptionnelle de continuer à exercer ses fonctions
d'enseignant.
Lambert
Lepage :
Lambert,
Louis, Léopold Lepage, frère ainé de Louis Lepage
termine ses études diplômé de
l'université
de liège, docteur en philosophie et lettres.
À l'âge de 23 ans, il entame sa
carrière
professorale à l'athénée de Thuin. Il
exerce
ensuite les fonctions de professeur à
l'Athénée
royal de Huy jusqu'en 1932 et reçoit la croix de chevalier
de
l'Ordre de Léopold.
En 1898, il a fondé la Mutuelle
Saint-Lambert. Pendant la
guerre 1914-18, il organise le ravitaillement de la population,
crée la soupe scolaire et fait distribuer des petits pains.
On
lui décerne la médaille du Comité
national.
Hermalle est la seule commune entre Liège et Huy qui ne
dispose pas encore de l’électricité.
Lambert Lepage obtient le raccordement au réseau en 1922 ce
qui est évidemment fêté.
En 1923, il transforme en écoles officielles les
écoles
adoptées des Potesta et crée de nouvelles classes
maternelles et primaires, renouvelant le matériel scolaire
et
fournissant un caban imperméable à chaque enfant
–
ce qui est noté par un journaliste contemporain comme
« une chose remarquable ».
L'inauguration des écoles et du kiosque de la place de
Hermalle se déroule en 1929. ( Pour
l'histoire des écoles, lire
la page dédiée.).
Avec des mandataires de communes voisines, il crée un
Comité intercommunal des mieux doués avec
dotation de
bourses spéciales permettant aux enfants d'ouvriers de
poursuivre leurs études, comité qui fonctionne
jusqu'en
1928. À l'intention des enfants
« débiles », il va
organiser pendant
plusieurs années des séjours à la mer.
Il va aussi
créer deux bibliothèques, l'une à
Hermalle,
l'autre dans le hameau de la Mallieue.
Il parvient à convaincre le ministre Ruzette de la
nécessité de reconstruire le pont de Hermalle qui
est
ré-inauguré en 1924.
Il fait moderniser les routes du Tilleul, de la Héna, du
Mabotte
(? de Magotte ?), du pont et le chemin de Chaumont.
Pour faire disparaitre les épidémies de typhus et
de
fièvre scarlatine, il fait canaliser les rigoles et fait
passer
un projet d'installation d'une distribution d'eau potable, dite
«
alimentaire » dans le village ; Le projet est
accepté par
la
province
suite à la demande du 13 octobre 1931.
L'arrivée de l'« eau
alimentaire »
est
vécue comme un évènement d'importance
; chacun ne disposant pas d'un puits, il était
fréquent
que plusieurs voisins aillent s'alimenter dans une
propriété visine privée –
ainsi en était-il
à la ferme castrale qui approvisionnait en eau de source,
notamment, le curé du village.
Le nom de
Lambert Lepage, en reconnaissance, va être donné
au petit
square qui
fait face
à la Maison communale et au milieu duquel se trouve le buste
du
« bienfaiteur », et aussi à une
rue
parallèle à l'actuelle chaussée Freddy
Terwagne.
L'année de sa mise à la retraite par limite
d'âge,
en 1932, Lambert Lepage perd son épouse et reste avec ses
deux
fillettes Marthe et Lisette.
N.B.
La
majorité de ces informations provient du discours
funéraire de Monsieur Orban, reproduit dans un hebdomaire de
la
région Huy-Waremme paraissant le samedi, daté du
28
février 1938 et nous communiqué par monsieur Jean
Mossoux.
La parenté entre Lambert et Louis Lepage a
été
établie par les recherches de monsieur Benoît
Louis.
Nous les en remercions vivement.
|
En janvier 1941, l'hiver est si rude que la
Meuse a gelé et
qu'on peut la traverser à pied.
La famille de
Potesta - III :
En
famille et dans le village, René de Potesta est
jugé rigoureux voire difficile.
Il est fort bon tireur au
tir
aux pigeons ce qui l’amène à de
fréquents
voyages ; au retour de l'un d'eux, il ramène un
Séquoia dendron
giganteum, d'abord placé dans le potager, puis
déplacé à l'aide d'une grue dans la
drève,
en façade nord de la Ferme castrale. Ce séquoia
est
répertorié arbre remarquable par la
Région
wallonne depuis 2000. Le parc compte aussi un orme classé,
cité dans le livre des arbres remarquables de Belgique, un
catalpa et un tulipier de Virginie. La propriété
compte
alors 600 hectares.
J. Silvestre, Le Château de
Hermalle-sous-Huy, 1938.
Durant la
Deuxième Guerre mondiale, René de Potesta est
membre actif de l'A.S., l’ Armée Secrète,
à l'État Major
de la Région de Namur durant la Deuxième Guerre
mondiale. Il est arrêté le 13 juin 1944
à
Maredsous (Denée) avec des moines de l'Abbaye,
dénoncé par un résistant qui avait
été aussi un indicateur de la Gestapo
caroloringienne.
Alie de Potesta, au désespoir, va pendant des
années
tenter de retrouver la trace de son époux René et
finalement établir qu'il est détenu dans les
prisons
de Namur,
Mons, Charleroi, puis transféré en Allemagne,
d'abord
à Buchenwald puis dans le kommando de Blankenburg-Klosterwerke
lié
au
tristement célèbre camp de Dora.
Pendant 7
mois René de Potesta
subit comme les autres la vie décrite par Lucien Defauw
; comme lui, il va devoir faire la marche forcée
d'évacuation de 80 km jusqu'à Magdebourg puis
être
embarqué sur une péniche pour descendre vers
Lubeck
où grâce à Folke Bernadotte,
la Croix-Rouge prend en charge les prisonniers qui ont
réussi
à survivre et les transfère en Suède.
René
de Potesta est rapatrié le 5 ou le 6 juillet 1945.
Extrait de la Citation de l'Armée Secrète - 25
mars 1946 : (...)
il se laisse torturer plutôt que de parler. Bien
plus, il
risque de perdre sa dernière chance de sauver sa
tête en
prévenant à plusieurs reprises ses compagnons du
danger
qu'ils courent.
Son dénonciateur, Raoul Cassart, né à
Ittre le 12
juillet 1904, est traduit en justice devant le Conseil de guerre
à Namur, et René de Potesta y
témoigne. Le
procès dure plusieurs jours et l'auditeur requiert 20 ans
d'emprisonnement contre Cassart en juin 1948 tandis que la
défense plaide l'acquittement. Le quotidien Vers
l'Avenir
y consacre plusieurs articles.
C'est la Cour Militaire de Liège qui clôt ce
dossier,
infligeant à Cassart 15 ans de détention
ordinaire et
accordant le franc symbolique à la partie civile du baron de
Potesta.
|
La fin de la guerre permet de remplacer les deux cloches (sur les trois
que possédait l'église) que les soldats allemands
avaient réquisitionnées pour les faire fondre et
transformer en
canons.
Deux dalles commémorent la mémoire des
héros villageois des deux guerres mondiales, l'une
placée lngtemps sur le
côté de l'ancienne maison communale - rue
Wérihet, puis déplacée sur le mur de
l'église Saint-Martin pour cause de réaffectation
du bâtiment communal,
l'autre contre l'église
Saint-Martin - place des Combattants ; ce dernier monument a
été déplacé vers le chevet
de
l'église lors de la rénovation de la place en
2013.
Une troisième sur le mur d'enceinte du site castral
– chaussée Freddy Terwagne – rappelle,
sans ambages, le
décès d'un résistant abattu par
l'occupant allemand alors qu'il tentait d'échapper
à la fouille de la Ferme castrale où il
était réfugié.
Mais rien ne rappelle l'action des résistants et plus
particulièrement celle de deux jeunes femmes…
Onolinda
Cunaccia :
Elle
nait le 1 er octobre
1909 à Wells Creek. P.a., Comté de Somerset,
Pennsylvanie, d'un couple d'ouvriers italiens originaires de
Pinzolo (Trente, Italie) et possède donc la
nationalité américaine.
Elle a 16 ans quand la famille arrive d'Italie en Belgique et
s'installe à Gives (Ben Ahin) où
« Linda » va travailler au
charbonnage. Trois ans plus tard, elle déménage
avec ses parents à Dudelange (Grand Duché de
Luxembourg) et devient servante.
Le 6 juillet 1929, elle épouse à St-Georges
« Joseph » Giuseppe Gianni Ceol,
de six ans plus âgé, arrivé en Belgique
en 1924 et devenu Engissois depuis 1927. Le couple va vivre
successivement à Engis, Amay, Saint-Georges. La
Sûreté de l'État signale que Linda « parait
honnête ». Elle ne travaille
plus : Joseph a un bon salaire à l’usine de
Flône.
Le 25 avril 1936, la Gendarmerie contrôle les six
participants à une réunion antifasciste
à la maison du Peuple d’Engis. Parmi eux se
trouvent Joseph et son cousin Lino Scarian, connu comme militant
communiste. La Sûreté publique enquête
sur l’ « attitude au point de vue
politique de Joseph »… Elle
constate qu'il est absent des meetings ou manifestation subversive du
canton, non abonné à un journal
subversif,… mais qu'il reçoit quotidiennement la
visite de Lino.
Celui-ci, persécuté par l'OVRA (Organisation
faciste italienne de répression des anti-facistes), a
émigré en France (1923) puis en Belgique
(1924).
Lino devient délégué des groupes de
langue italienne au comité central du P.C.B., responsable
local à Engis de la section italienne du Secours Rouge
International. En 1936, la guerre civile éclate en Espagne
et Lino s'engage car
« Ayant
souffert depuis mon enfance, je ne pouvais pas être absent de
la lutte du peuple espagnol pour le pain et la liberté
menacée (...) En tant qu'ouvrier opprimé et
amoureux de la liberté, je me suis
précipité à son secours et j'ai
été parmi les premiers internationaux
à avoir pris les armes contre l'ennemi commun : le fascisme.
»
En septembre 1936 Lino se bat dans le bataillon Garibaldi, combat sur
tous les fronts de Madrid à Guadalajara où il est
blessé. Plus tard, dans le 2 e
bataillon de la brigade Garibaldi, il est présent dans
toutes les actions militaires du département.
Blessé sur le front de l'Èbre (07-11-1938), il
rentre en France en 1939 et est interné au camp de Gurs.
Il est évident que la famille Céol a subi
l'influence de Lino Scarian et fermement partagé ses idées.
Linda et Joseph adoptent José Miguel Berastegui, un des 5130
enfants abrités en Belgique pendant cette guerre.
« Zio (oncle)
José » – comme l'appellera la
famille –, décèdera à Huy le
30 juillet 2006, âgé de 81 ans.
Le 11 janvier 1941, le couple déménage
à Hermalle /s Huy, Rue Magotte 218, avec ses deux fillettes
Gloria et Jeannine (nées en 1933 et 1936).
Linda a gardé sa nationalité
américaine mais, sur le conseil de Camille Moisse,
secrétaire communal hermallien de l'époque, se
fait inscrire comme Italienne au registre de la population pour
éviter des représailles des Allemands. La
situation administrative aurait dû être
rétablie une fois le danger écarté ;
ce ne sera fait qu'en 1962 lorsqu'elle souhaitera revoir ses
frères et sœurs aux USA.
La même année, le conseul italien signale que Lino
a repris ses activités de résistance
antifasciste. En fait, Lino sera reconnu résistant
armé à
partir du 1er juin 1940…
la Belgique ayant été envahie le 10
août.
Les petites-filles de Linda, indépendamment l’une
de l’autre, affirment que Linda était
très taiseuse mais qu'« elle a
sauvé le village ». Elles sont certaines
qu’elle a caché des Anglais et des
Américains dans des galeries horizontales donnant sur le
puits au fond du jardin – mais en 2021, il n’y a
pas de puits… dans ce jardin de la rue Magotte.
1963 : Lino et Linda avec les
petit-enfants
René (fils de Gloria), Chantal et Danièle (filles
de Jeannine)
Deux certitudes :
1 - Elle a gardé un contact ininterrompu avec avec Lino
Scarian, « ouvrier d’abattoir »,
domicilié à Hermalle-sous-Huy, reconnu
résistant armé pour avoir
- diffusé de la presse
clandestine ; abrité un dépôt
d’armes
- brulé des champs de colza et
de lin
- participé à
l’enlèvement des registres de la population
à l’administration communale
- hébergé des
réfractaires et des résistants
- aidé à
l’évasion d’un prisonnier russe
- été membre du Front
de l’Indépendance, partisan armé
III/1271
2 - En 1962, un document administratif relatif à la
nationalité de Linda indiquait
« (...) De
plus CUNACCIA est décorée de la
Médaille de la résistance belge lui
décernée par Ar. Min. n°5384 en date du
17/9/1948. »
Pour quels faits ? On l’ignore toujours…
Le 30 novembre 1948, famille et enfants ont
déménagé de la rue Wauters Hermalle
à Amay, ch. de Liège. Joseph est
décédé en 1960, Lino en 1975, Jeannine
en 1980, Linda en ±1990…
|
Marie
José Brasseur :
Marie
José,
Thérèse, Joséphine, Brasseur
naît le 22 aout
1926 à Hermalle-sous-Huy. Elle habite avec ses
parents,
Jules Joseph Brasseur et Marie Victorine Rasquin, rue d’Aux
Houx
203 à Hermalle.
À l’âge de 16 ans et demi, elle est
déjà affiliée aux mouvements
clandestins S.R.A.,
Association des Filiéristes et Aide aux Ailes
Brisées
Alliées.
Elle est membre actif du Service D, mouvement de résistance
armée. Elle a fait partie du réseau Escape et de
l’U.S.R.A. (Union des Services de Renseignement et
d’Action).
Son père Jules est un résistant convaincu : il va
héberger des résistants, des parachutistes
anglais et des
prisonniers évadés d'Allemagne, et fabriquer des
fausses
cartes d'identité, de travail et des timbres de
ravitaillement
que Marie-José transmet. Elle vend aussi des vignettes
représentant des fusillés de la citadelle et des
journaux
clandestins (ex. Le Coq
Wallon et L'Arc-en-ciel)
à des Hermalliens et à quatre régentes
à
l‘École moyenne de Huy où elle se rend
à
vélo en tant qu’élève ; elle
remet les
sommes recueillies à son père.
De son propre aveu, Marie-José lui obéit
lorsqu’elle conduit des français
évadés, et
des paras Anglais sur le chemin qui les mène à un
réseau de prise en charge.
En 1948 : elle est reconnue résistante
armée isolée
(n’appartenant pas à un groupement).
En 1949, monitrice dans un home ONE de Comblain-au-Pont, elle introduit
une demande de reconnaissance au titre de résistante civile
et l’obtient.
La commission de contrôle de Liège fait appel pour
lui refuser ce titre car le Commissaire de
l'État J. Blanpain donne pour avis :
« (…)
En fait l'activité principale était
l‘œuvre
de son père mais occasionnellement elle a
été
chargée par celui-ci de conduire à une autre
personne des
hébergés par son père; elle a
également
remis sur les ordres de son père des timbres et cartes
d'identité, etc. à des gens qu'elle ne
connaissait pas
personnellement. Les faits sont attestés par (…)
Quoi qu'il en soit j'estime que pour louable et méritoire
qu'elle ait été, cette activité ne
peut valoir le
titre de Résistant Civil. ».
Et le titre lui est retiré !
En fait, elle a trop minimisé son action : diverses
attestations, dont la première date de 1942 !, indiquent
- qu’elle servait aussi
d’agent de renseignement,
- qu’elle a apporté
une aide
précieuse aux prisonniers français
évadés
jusqu’à la Libération (daté
1947),
- qu’elle a mis en lieu
sûr des personnes hébergées lors de
perquisition allemandes,
- qu’elle a transporté
depuis le
dépôt du domicile hermallien, de 1943 à
la
Libération, des armes et des munitions
nécessaires
à l’A.S., à l’A.Lib., aux
Partisans
Armés et au 1er
régiment du M.P. du Front de l'Indépendance,
secteur Huy-Waremme (daté 1947),
- qu’elle a fourni des
vêtements civils à des prisonniers russes
cachés au Bas-Bois (daté 1953).
Elle va en appel ; une enquête s’en suit (avec des
questions pointues auxquelles il doit être difficile de
répondre 10 ans après les faits,
d’autant que le
secret et le compartimentage étaient des
impératifs de
sécurité…) et, le 14 novembre 1953,
elle obtient
le « droit au titre de Résistant
civil »
pour la période du 31 mars 1943 au 8
septembre 1944.
Pour sa qualité de résistante armée,
il y a aussi
eu révision et cette qualité a
été
maintenue pour les actes
- pilotage d'aviateurs - prisonniers
évadés (Français et Russes)
- placement et aide aux
réfractaires
- diffusion de la presse clandestine
- membre réseau
Escapé : carte n° 306
- membre U.S.R.A. - carte n° 782
Elle était alors mariée à Joseph Lomba
et habitait à Seraing.
Elle épousera en secondes noces Jean Del Bel Belluz qui nous
a permis, en 2014, de photographier ses médailles.
De gauche à droite :
médaille
« 1940 1944 Association nationale des filiéristes
passeurs
d’hommes de Belgique » ;
médaille de la Résistance armée
« 1940
Resistere 1945 » ; médaille de
l’Union de la
Résistance et Jeunesse patriotique belge «
Résistance belge 1940-1944 », avec
étoile en agrafe
sur le ruban rouge et noir ;
médaille commémorative de la guerre
1940-1945 avec petite agrafe au ruban,
en forme de sabres croisés indiquant le service au combat en
1940 ou dans la Résistance armée.
|
Quasiment personne, même parmi les anciens de Hermalle, ne se
souvient de ces courageuses jeunes femmes en 2020.
Certains n'ont découvert la qualité de
résistante
de Marie José qu'à son
décès, son
deuxième époux ayant fait placer les
médailles sur
le cercueil.
Pour Linda, il n'y a plus que la pauvre parole de ses petites-filles.
Quatre autres femmes ont aussi été
résistantes
mais nous ne connaissons que les noms de Jeanne Derwael l'infirmière, de
Laure Charlier l'épouse du garde-champêtre Vandeweghe, Isabelle Massart-Leroux...
Rien sur leur vie. Merci pour
vos compléments d'information !
Côté masculin, pour Hermalle et Engis, sont restés
en
mémoire soit par la parole des anciens, soit par la presse, soit
par des photos et documents divers, soit par le nom de rues les
patronymes des combattants
résistants
René de Potesta, Louis Dispas, Pierre Servais, Victor
Bourguignon, Renier Baldewijns qui dirigeait
le réseau local du Front de
l’Indépendance.
Alphonse Lecarte, chef de section de l’Armée
secrète, et Nicolas Lhomme qui décéda
le 30 mars
1945 dans le camp de concentration d’Ellrich.
Et encore Roger Ancia qui fut emprisonné à la
citadelle
de Liège avec Émile Dehin, le chef de
réseau local
du Front de l’Indépendance. Gaston Libert le fils
du
batelier, et René Dengis engagé volontaire
à 18
ans aux chasseurs ardennais, René Boneux et Raoul Mossoux
qui
transportait des journaux clandestins et des marchandises
pour les réfractaires de la commune d’Antheit dans
le
camion de la
coopérative…
Il faut aussi se rappeler Georges Longrée qu’on a
longtemps considéré comme un traitre alors qu'il
accomplit de très nombreux actes de résistance et
entra
finalement dans la Gestapo avec l'intention de jouer un double jeu.
Soupçonné et dénoncé par un
de ses nouveaux
collègues, il fut arrêté le 18 aout,
torturé, incarcéré à la
citadelle,
condamné à mort et exécuté
d'une rafale de
mitraillette.
Dans un tout autre domaine, rien ne rappelle non plus que les rails de
la 4e
ligne de tramways ouverte par la Société
Nationale des
Chemins de fer Vicinaux (SNCV) le 25 octobre 1913 entre Engis
(gare) et Dammartin ont été
démontés par
l'occupant allemand en 1916 et réutilisés sur les
chemins
de fer militaires du front de l'Yser…
Cette ligne fut reconstruite en 1923 et, n'étant
utilisée
que par peu de gens, fut supprimée en 1932 au profit des
autobus
; comme le nombre de ceux-ci fut fortement réduit pendant la
Deuxième Guerre mondiale, elle retrouva du service pendant
quelques années - jusqu'au 19 mars 1950. Il en
reste
quelques rails place des Déportés et des
Réfractaires…
Il ne reste rien, par contre, des câbles
électriques qui
permettaient le roulage des trolleybus (autobus à traction
électrique dont le moteur reçoit le courant des
câbles aériens conducteurs, les
caténaires, par
l'intermédiaire d'une perche mobile). Une ligne de la RELSE
(Société Anonyme des Railways
économiques de
Liège-Seraing et extensions) a pourtant
existé…
Elle devait prolonger la liaison électrique Seraing-Ivoz
jusqu'à la Mallieue et ce projet avait
été
approuvé par arrêté royal le 26 mars
1938.
Mais la guerre a modifié les plans : le pont-barrage
d'Ivoz-Ramet étant détruit, la jonction du
tronçon
de la rive droite avec Flémalle n'est plus possible.
Flémalle-Haute (passage à niveau)-Engis, ouverte
le 5
janvier 1942, reste donc isolée du reste du
réseau ;
parqués au dépôt de Jemeppe, ses
trolleys bi-mode
arrivent à la tête de ligne de Flémalle
grâce
à la ligne de tramway et à leurs batteries qui
permettent
la très longue traversée du passage à
niveau de
Flémalle. Bien que prolongée jusqu'à
la Mallieue
le 5 janvier 1943 par un arrêté du
Collège des
Secrétaires généraux (qui fut
confirmé le
11 février 1946 par un arrêté du
Régent),
l'exploitation de la ligne ne devient régulière
qu'en
octobre 1945 car la libération de Liège et le
transit des
convois alliés participent, autant que la pénurie
de
pneus et les restrictions d'électricité,
à de
nombreuses perturbations.
L'unification des tronçons des deux rives formant un trajet
de 12 kilomètres[Lambou]
se fait le 10 mars 1948, après la reconstruction du
pont-barrage
mais la section vers la Mallieue n'est constituée que d'une
ligne, pour des raisons d'économie, et cela impose des
changements de polarité et des déplacements de
perches au
personnel. Jusqu'aux années 1960, le départ vers
la
Mallieue se fait à chaque heure 47. Le 31 aout 1963, la
ligne de
trolley est arrêtée et remplacée par un
service
d'autobus ; les câbles, démontés
l'année
suivante, vont être largement
réutilisés pour
l'aménagement du tram vert au nouveau pont de Seraing[Godeaux].
Édouard Vandeweghe est nommé bourgmestre de
Hermalle en
1946 ; bourgmestre fort actif et apprécié, il va
être réélu pour la
législature 1952-1958. La
cité d'habitations sociales construite au début
des
années 1960 porte son nom.
La population s'enrichit d'étrangers, et notamment
d'Italiens.
La reconstruction du pays après la Deuxième
Guerre mondiale nécessitant une importante main
d'œuvre, un
protocole a été signé en 1946 entre la
Belgique et l'Italie, garantissant des livraisons de charbon
contre…
50 000 travailleurs que le gouvernement belge s'engage à
loger et à payer décemment. Nous avons
trouvé le témoignage d'un enfant
d'immigré [14]
:
«
Au début de 1947, la famille Barcaro vit à
Vicenza, près de Venise. Le père,
maçon fumiste - donc capable de travailler dans les fours
à chaux –, a vent de la possibilité
d'aller
travailler en Belgique, en échange d'un bon salaire. Voyant
là une solution à la misère, il
décide de tenter le coup. Il signe un contrat avec la
carrière des fours à chaux à
Hermalle-sous-Huy et part seul au mois de février. Puis
revient chercher femme et enfants en octobre.
Armando,
cadet
de la famille, a alors 4 ans. Il se rappelle…
«On
était rassemblé sur le quai numéro 6
à la gare de Milano Centrale. On a voyagé dans
des wagons en bois qui servaient au transport des troupes pendant la
guerre 14-18. On a changé plusieurs fois de trains,
notamment en Suisse. Puis on est arrivé à
Liège Guillemins. La rame de wagons a
été rattachée à un train de
marchandises, jusque Hermalle-sous-Huy, où on est
arrivé dans une gare de triage après un voyage de
plus de 20 heures.»
La
première nuit, les Barcaro seront logés par une
famille amie, aussi originaire de Vicenza. Le lendemain, ils
s'installent dans la «maison» qui leur a
été attribuée par la
carrière où travaille le papa. Il s'agit d'une
maison de quatre pièces au rez-de-chaussée et
quatre pièces à l'étage…
à partager à deux familles! Les Barcaro
s'installeront à l'étage.
Il
n'y a pas de WC : le papa a lui-même creusé la
feuillée au fond du jardin !
Un
robinet et un poêle seront les seuls
éléments de confort.
L'art
de
la débrouille, un peu de braconnage et de chapardage sont
indispensables pour tenir le coup et manger à sa faim.
Par
contre, dès leur arrivée, les enfants sont
scolarisés et suivis, au niveau de la santé, par
la Croix- Rouge de Belgique. Armando, anémique, sera
d'ailleurs soigné pendant quelques temps dans un centre
à Dolhain.
Le
dimanche, les familles italiennes se réunissent à
la Cantina, où les femmes discutent et les hommes jouent aux
boules autour de charcuteries ou d'une pizza typiquement de
là-bas… Deux ans plus tard, la famille s'installe
à Engis, dans une petite maison unifamiliale avec un jardin,
appartenant toujours à la carrière. »
Au centre de Hermalle, le cimetière emmuré qui
longeait
les deux flancs de l'église est réduit de
moitié :
sa partie sud, rasée, devient la place des Combattants, et
la
« place de l'église » (au nord de
l'autre partie, le long de la Gerée),
où se
réunissaient les villageois et où jouaient les
enfants,
perd son attrait public.
Quand je
revois
cette chère petite place déserte,
Je
ressens comme un malaise, une espèce d’angoisse.
Son
grand calme actuel me pèse sur le cœur
Quand
on a connu naguère, tant de bruit et d’ardeur.
Tout
gamin, la place était le privilège de nos
ébats.
Elle
a connu toutes nos prouesses et nos heureux exploits.
Le
talus offrait une belle glissade en face du presbytère.
Notre
souci, retrouver la balle dans le vieux cimetière.
Le
soir nous rentrions parfois tout penaud [sic].
Lorsque nous marchions, le sabot donnait un son faux.
Le dribling trop rude avait créé
l’accident ;
Remontrances, et petit cercle, servaient de renforcement.
La ruelle de l’Eglise était propice pour jouer des
farces.
Avec une betterave, OSCAR, ce truculent comparse,
Avait fabriqué une tête de mort
éclairée par une bougie.
Vue par dessus le mur, le passant RAPHAEL frisa l’apoplexie.
Le jeu de la cachette nous intéressait en particulier
Les murs, les véhicules, tout obstacle devenait un
allié
Découvert, un sprint effréné
désignait le gagnant ;
Nous avons battu des records, mais le chrono était absent.
Nous étions témoins des activités des
fermes du château.
Dès
l’aube, c’était le vacarme pour le repas
des animaux.
Mélodie
champêtre, piaffement et beuglement du bétail.
Pour
les travaux, on apprêtait tout l’attirail.
Attelage dans la cour de la Ferme castrale.
Nous
remercions l'auteur de cette photo de se faire connaitre.
La sortie
des
chevaux était un spectacle inoubliable ;
Tête
fière, crinière lissée, leur
beauté était remarquable.
Dans
le frimas du matin, la buée sortant de leurs naseaux
S’élevait
vers le ciel en petits nuages de vapeur d’eau.
La
saison des pâquerettes retrouvera le troupeau dans le
pré.
Pour
la traite, les vaches rentreront avec le vacher.
Assises
sur un tabouret, les trayeuses collées à la panse
En
rayons croisés, tireront le lait en abondance.
La
rentrée des moissons nécessitait un nombreux
personnel.
Sous
le porche, la perte de gerbes était traditionnelle.
Les
bras manieront la fourche pour la mise en place,
Un
chardon mal placé décochera à
l’entasseur une grimace.
Eh
oui, bien sûr, c’était le temps de notre
jeunesse.
Les
décades ont passé amenant une certaine richesse.
L’affirmation
n’empêche pas le droit de rêver,
Détruisons
le moderne et les jeunes pourront travailler.
La
petite place si déserte à présent me
fait mal au cœur.
Pareil
à la démolition de Flône, me donne la
rancœur.
Le
temps passé était difficile mais il faisait bon
vivre ;
Epoque
d’heureux souvenirs, tu m’enivres.
Gustave
Séverin, Souvenirs
(La place de l'église)
La famille de
Potesta - IV :
L'épouse de René de Potesta, Amélie
Paule Marie de Meeus dite
« Alie », décède le
1 er
septembre 1971 ; le corps - visage maquillé, ongles vernis
-,
revêtu d'une belle robe, est exposé dans le hall
du
château pour que les villageois puissent rendre hommage et
garder
encore un souvenir de cette femme d'une grande beauté et
d'une
extrême gentillesse.
Le 25 juin 1977, René meurt à son tour et laisse
le domaine
en indivision
entre les enfants qu'il a eu de son épouse :
- Hélène Emma
Henriette Marie
Ghislaine, 1922 - 2011 (qui épouse l'aviateur
Léon
Marie Joseph
Yves Ghislain Benoit Baron de Villenfagne de Vogelsancx),
- Anne Marie
Claire Ghislaine, 1923 - 2000 (qui se marie avec Jean André
Marie Joseph
Ghislain Baron de Bassompierre, ambassadeur honoraire du Roi des
Belges)
- Charles
Édouard René Marie Ghislain de Potesta, 6
juin
1925-27 avril 2015, marié le 20 Mars 1948 avec Nicole Marie
Thérèse de Gaiffier d’Hestroy, puis le
27 aout 1992 avec Nicolle Motte.
Charles
Édouard René Marie Ghislain de Potesta,
dit Charly, va habiter au château de
Hermalle avec son épouse Nicole de Gaiffier
d’Hestroy
jusqu'en 1933, date où il s'installe dans une
propriété d'Annevoie qui lui vient de
sa mère, car la cohabitation d'un jeune couple dans la
demeure
familiale régie par un père autoritaire n'est pas
toujours aisée.
Menu du repas offert à
Charles de Potesta à la ferme Wéry
coll. BMG M-III 0266
Charles
s'occupe des fermes qui dépendent du château,
d'abord de 1947 à 1954 en
association avec un monsieur Romedenne, dont on dit qu'il s'est
livré
au marché noir durant la guerre - la nuit, des charriots
quittaient la
ferme, tirés par des chevaux dont les sabots
étaient emmaillotés de
linges - ce qui débouche sur un procès
–, puis seul
(et même après son
installation à Annevoie).
Cultivant lui-même, Charles de Potesta fait construire
vers 1950, sur l’idée de son père, dans
les écuries de l’aile ouest de
la Ferme qui avaient abrité une vingtaine de chevaux, une
dalle en
béton armé pour faciliter le pelletage
à partir du chariot. La
modification d'une baie que cela implique sera corrigée dans
les années
1990.
La demi-tourelle mitoyenne à l'avant-cour du
château et à la
bassecour de la ferme sert de chenil.
Dans un autre poème, Gustave Séverin a
écrit :
Chère
Gérée, les chevaux t’ont
quittée, c’est dommage ;
Les
moteurs te [sic] remplacent, ils travaillent davantage.
L’ancienne
méthode était pourtant courage et passion,
Ces
machines à chômeurs méritent quelques
réflexions.
Pourtant,
malgré la mécanisation,
l'activité agricole
générée par le château
diminue dans les années 1970.
En cause, pour une grande part au moins, les expropriations
prévues dès 1967 et
réalisées pour la
construction de la nationale 90 à quatre bandes qui coupe le
village de ses campagnes mosanes et pour l'ouverture d'un parc
industriel dans cette zone. Dans un premier temps, la culture reste
possible mais d'une année à l'autre
l'entrepreneur
agricole peut voir la superficie cultivable fortement
réduite.
Charles
Édouard René Marie Ghislain de Potesta et
Nicole Marie Thérèse de Gaiffier
d’Hestroy ont
eu 2 filles et
deux fils :
- Isabelle Marie Ghislaine,
née le 23 janvier 1958 à Huy, qui
épouse
Jorgé-Enrique Carmona le 10 octobre 1986 à
Arequipa
(Pérou) ;
- Doris Amélie, née
le
15 avrril 1949, qui épouse Bernard de Thomaz de
Bossierre,
puis Didier Piers de Raveschoot ;
- Jean Louis René de Potesta,
né le 8 février 1951 à
Liège, baron, qui
épouse la princesse Sophie de Hohenberg
- Philippe
Paul Guy de
Potesta, né le 5 juillet 1954
à Liège, écuyer, qui épouse
Nathalie
Raphaëlle
Camille baronne de Tornaco.
Philippe Paul
Guy de Potesta
Aucun projet de
rentabilisation des
bâtiments (transformation en centre de détente et
de loisirs ou en maison de repos…) n'a abouti. Philippe Paul
Guy
de Potesta continue l'activité agricole mais dans les
mêmes conditions que son père.
Il rachète le château qui était
toujours en indivision mais ne le garde que peu de temps.
Après la vente de la ferme aux deux tours, après
celle de
la Ferme castrale, il vend le château en 1992 à
Geoffroy
de Jamblinne de Meux qui le remet sur le marché immobilier
deux
ans plus tard.
Le château, séparé de sa ferme
castrale, n'est plus
propriété d'aucune famille noble.
|
Le moulin hydraulique de Hermalle a cessé de
travailler,
semble-t-il, dans les
années 1960, tandis que ses deux plus proches voisins
ombrésois continueront de produire
jusqu’en
1991-1992 de la farine panifiable mais aussi de la farine et des
aliments pour le bétail et même des
engrais. Faute
d’un
entretien que l’activité commerciale
n’impose plus,
le bâtiment et le
mécanisme se délabrent ; la
végétation
envahit la roue, difficile d’accès et donc
pénible
à nettoyer, une meule en pierre disparait,
et il va être nécessaire
d’étançonner
la
charpente pour éviter son effondrement.
L’axe de la
roue, une grosse
partie des engrenages et les trémies restent cependant en
place.
À front de rue, une annexe de stockage du XIXe
siècle, sans intérêt
architectural, va être démolie en 2009.
L'espace bâti s'accroit de part et d'autre du
centre ancien, tout au long de la chaussée principale, et
grignote peu à peu le contrefort du plateau condruzien en
direction de Clermont-sous-Huy, sans trop de cohésion quant
aux matériaux, plans et types de bâtiment.
Panorama
du centre de Hermalle vu du sud. Décembre 1992.
Au centre les tours du château. À
l'arrière la découpe de la colline
causée par l'exploitation d'une carrière.
La comparaison
entre le nombre de commerces
à 50 ans d'intervalle indique clairement dans la
seconde partie du siècle la modification de
l'activité économique du village, sans nul doute
due à la construction, dans les années 1980, de la voie
express N90 qui
allège fortement le charroi automobile… et prive
les
petits commerces de chalands, mais aussi à l'installation
des « grandes surfaces » d'Amay, Engis, Huy,
Jemeppe et à la modification des habitudes de consommation
qui entraine la clientèle locale à
délaisser les petits fournisseurs.
Les villageois ont trouvé emploi dans l'industrie et les
services. L'agriculteur est devenu minorité.
Le 1er
janvier 1977, Hermalle-sous-Huy « disparait » sur
le plan administratif : la fusion des communes
décidée par le gouvernement belge
réduit son territoire (la Mallieue [15], partie
située sur la
rive droite de la Meuse passe à la commune de
Saint-Georges qui devient Saint-Georges-sur-Meuse) et l'englobe avec
l'ancienne commune de
Clermont-sous-Huy et une partie de Éhein dans l'entité d'Engis
dont Vicky Albert est le bourgmestre socialiste. La
superficie de la nouvelle commune est de 27,7 km2
; elle va être jumelée avec la ville
française Ribécourt-Dreslincourt,
dans l'Oise, le 22 septembre 1980.
Le village d'Engis, où se trouve centralisée
l'administration, est situé sur la rive droite, à
4 km en aval de Hermalle ; il n'y a pas de moyen de transport en commun
direct
entre le centre des deux villages ; le préfixe
téléphonique est
différent (donc le tarif plus élevé)
et, surtout, les villageois n'ont ni la même
mentalité, ni la même culture.
Pendant plus de 20 ans, les Hermalliens se sentiront
frustrés et quelque peu négligés.
Leurs anciennes archives officielles ne sont plus accessibles pour
diverses raisons ; ils ont parfois l'impression que leur
passé leur échappe.
Fin des années 2000, malgré de nombreux efforts
– notamment
des animateurs du Centre culturel –, l'intégration
des deux populations n'est toujours pas réalisée.
Malgré plusieurs demandes depuis 1994, il n'existe toujours
pas
aujourd'hui, à Engis, de signalisation routière
qui
indique Hermalle et les automobilistes qui ne connaissent pas la
région peuvent facilement tourner en rond pendant 20
kilomètres pour trouver Hermalle si par malheur ils se sont
d'abord rendus à Engis…
La fusion des communes a offert à Saint-Georges s/ Meuse la
gare
de Hermalle qui est fermée au public en 1993. Il faut donc
se
rendre à Engis par le seul bus qui passe dans Hermalle, une
fois
l'heure, et
s'arrête au pont d'Engis, rive droite, puis traverser la pied
le
pont et monter jusqu'à la gare pour prendre l'omnibus.
Mais en 1994, la SNCB ferme les guichets d’Engis…
et la
salle d’attente, ne laissant aux voyageurs qu’un
abri
transparent, sans siège, sur chaque quai. Le souterrain
remplaçant l'ancien passage à niveau pour
l’accès à la voie 2 est en piteux
état, le
parking latéral n’a de parking que le nom, la gare
elle-même n’est plus qu’un lieu de
stockage pour
quelques services de la SNCB, l’information manque. La zone
d’habitat environnante s’est
dégradée, la
place où se tenait la fête se meurt…
On
comprend que les Hermalliens préfèrent rejoindre
Huy par
ce même bus qui les dépose à
côté
d'une gare moderne et fonctionnelle. Ils y perdent 5 minutes mais y
gagnent en confort.
En 1991, la Ferme castrale a repris vie avec une nouvelle affectation
basée sur la culture et le tourisme. Le
château est
devenu l'année suivante propriété de
la famille
de Jamblinne de Meux, puis deux ans plus tard d'une
société de cinéma publicitaire pour
l'industrie.
En 1993, on procède à la réfection du
pont de
Hermalle : l'accroissement du trafic et, surtout, du passage de
nombreux camions de fort tonnage l'impose.
L'hiver de
cette année-là amène une
crue importante de la Meuse et des
inondations dans la vallée. Le centre de Hermalle, plus
élevé de niveau, n'est pas
touché à
l'encontre d'Amay où 73 dossiers sont introduits
auprès
du Fonds des calamités. Il en va de même
l'année suivante.
1993 : la Meuse déborde,
envahit le bas de la rue du pont.
Quelques mètres au nord du poteau de signalisation, la
ridelle qui marque le bord du chemin
de halage n'est plus visible.
Notes
[13]
Informations plus détaillées.
[14]
Dans http://www.soumagne.be.
[15]
Mallieue
du latin leuca mala,
mauvaise portion de
chemin. Ce nom est déjà
cité dans le Cantatorium
de Saint-Hubert
(première moitié du XIIe
siècle) : In
leuga quae dicitur Mala inter Hoïum et
Leodium.
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