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Pour alléger ses difficultés financières, la Nouvelle Montagne décide, lors d’un Conseil d’Administration tenu le 3 avril 1882 et d’une Assemblée Générale tenue le 14 avril, d’apporter son établissement de Prayon à une Société encore à créer : La Société Anonyme Métallurgique de Prayon qui sera créée le 15 mai 1882 par acte notarié, passé le 2 mai de la même année. Cependant… La diversification de la Nouvelle Montagne Profitant d’une situation financière plus confortable, suite à la cession de son siège de Trooz, la Nouvelle Montagne modernise ses installations, construit un second laminoir (1882), et surtout développe des activités avales. En partenariat, elle crée deux filiales : la Société des Produits Chimiques d’Engis et la Société Anonyme des Engrais Concentrés. L’épuisement progressif des mines locales impose de recourir de plus en plus fréquemment à du minerai étranger, pour l’essentiel de la blende. Il faut donc penser à une installation de désulfuration efficace et à la fabrication d’acide sulfurique. En effet l’entreprise reçoit toujours de nombreuses plaintes des riverains concernant ses rejets gazeux. Une demande d’autorisation est introduite pour la construction d’une usine de fabrication d’acide sulfurique et une fabrique d’autres produits chimiques, des engrais [1], l’autorisation lui est accordée par la députation permanente, le 27 mars 1889. La construction de l’usine débute dès l’année suivante. [LNM] Elle produira également de l’acide nitrique, du bisulfate de soude, du sulfate de plomb et des sels de thallium. Quant à ses filiales :
Bien que la décision ait été prise dès 1887, la Société des Produits Chimiques d’Engis n’est créée que le 4 mai 1889. Outre la Nouvelle Montagne, qui est majoritaire, l’actionnariat est composé de la Société des Produits Chimiques de Droogenbosch, et de la Société des Manufactures de Glaces, Verres à vitres, Cristaux et Gobeleteries [siège à Bruxelles]. [MB-5/89]. La nouvelle société engage un Ingénieur-conseil : Louis Fromont dont il sera question plus tard. En 1898, les Sociétés de Droogenbosh et des Manufactures cèderont, à la Nouvelle Montagne, leurs participations dans la Société des Produits Chimiques d’Engrais, la laissant presque seule propriétaire de ces établissements. Toutefois, la fusion ne sera effective qu’en 1912. Les producteurs de zinc, obligés de griller leurs blendes, se trouvent en possession de grandes quantités d’acide sulfurique, or l’offre sur le marché de l’acide sulfurique est largement excédentaire. En 1861, Ernest Solvay, alors directeur adjoint de l'usine à gaz de Saint Josse-Ten-Noode, avait déposé un brevet pour la fabrication industrielle de carbonate de soude au départ de sel marin, d'ammoniaque et d'acide carbonique.[2] Il concurrence directement le procédé développé par Leblanc, qui utilisait de l’acide sulfurique. Il va rapidement supplanter ce dernier, en 1885, car toutes les installations utilisant le procédé Leblanc ont cessé leur activité. Ainsi disparait un important marché pour l’acide sulfurique. Les ventes n’épongent plus toute la production et, difficulté supplémentaire, l’acide sulfurique est un liquide hautement corrosif, de stockage difficile, et son expédition doit se faire soit en citerne soit en tourie de verre. Dans la seconde partie du XIXe siècle, le développement de l’agriculture, rendue nécessaire par l’augmentation de la population et un appauvrissement généralisé des sols, nécessite un emploi plus intensif de matières fertilisantes. Une nouvelle industrie s’organise et ouvre de nouvelles possibilités pour l’utilisation de l’acide sulfurique : la fabrication des engrais chimiques phosphatés. En 1873, Alphonse Briart et François-Léopold Cornet découvrent du phosphate à Ciply dans le Hainaut. En région liégeoise, en Hesbaye, la découverte de minerais de phosphates est le résultat d’études géologiques. La similitude des formations géologiques des massifs du Hainaut et de Hesbaye amène des géologues à y supposer l’existence de dépôts de phosphates de chaux analogues à ceux de Ciply. Les premières recherches sont entreprises ; en octobre 1884 débute l’exploitation des phosphates de Hesbaye. De nombreuses sociétés sont créées, dont l'une est particulièrement intéressante pour la Nouvelle Montagne : la Société de la Phosphatière créée, le 1er janvier 1894, par le Crédit Général Liégeois. ![]() Société
des Produits Chimiques. Construction
des « chambres de plomb » dont
l'appellation se justifie aisément :
la fabrication de l'acide sulfurique avait débuté dans des récipients en verre dans l'Angleterre du milieu du XVIIIe siècle et il fallut rapidement trouver une solution étant donné l'augmentation de la demande de cet acide. Les vases de verre furent remplacés par des chambres en bois garnies d'une paroi intérieure en plomb qui assurait l'étanchéïté et la résistance aux acides. À remarquer qu’aucun bâtiment des Engrais Concentrés n’est déjà construit dans la zone visible entre la route et le chemin de fer ! Comme beaucoup d’entreprises de son secteur, et notamment la Vieille-Montagne, la Société des Produits Chimiques d’Engis va développer une activité de production d’engrais phosphatés. Par mélange d’acide sulfurique et de phosphates, un engrais, appelé superphosphate simple – en abrégé super simple – contenant environ 15% de P2O5, soluble dans l’eau, est obtenu. Toutefois, sa faible teneur en phosphate assimilable par les plantes limite ses ventes aux zones proches des lieux de production.
En 1891, la Société des Produits Chimiques d’Engis crée, avec comme partenaire la firme H. et E. Albert [3] de Biebrich-sur-Rhin, la S.A. des Engrais Concentrés. Dans l’acte constitutif de cette dernière, la Société des Produits Chimiques d’Engis apporte le droit de produire des engrais, droit qu’elle avait elle-même reçu de la Nouvelle Montagne, et divers moyens matériels. Quant à la firme Albert, elle fait apport de divers procédés, de plans et des renseignements nécessaires à la bonne marche de l’usine.[MB-10/91] La nouvelle société se spécialise dans la fabrication des superphosphates doubles. Elle produira du superphosphate titrant de 12 à 20 % de P2O5 [4], du superphosphate double de 36 à 50 % de P2O5, du phosphate de potasse et du plâtre phosphaté. Il convient de souligner que l’usine des Engrais Concentrés fut, en son temps, une usine pilote. Elle lança la première sur le continent et une des premières au monde, la fabrication de l’acide phosphorique liquide 43/49°. ![]() Vue du sud. À l'avant-plan : les bateaux sur la Meuse pour le chargement de la marchandise apportée par rail (un agrandissement permet de distinguer, juste derrière le bateau de droite, une petite locomotive tirant des wagons). Sortant des grands hangars, des cables se dirigent vers la droite ; d'autres partent d'un abri vouté, à droite, pour monter jusqu'au haut de la colline car… Le plâtre provenant de la fabrication des engrais est mis en dépôt, sur la colline, à l’aide d’un transporteur aérien. ![]() Vue
du nord. Établissements des
Engrais Concentrés, carte postale s.d.
À gauche de l’image, une « chambre de plomb » est en cours de construction. En 1893, la Nouvelle Montagne introduit une demande pour la mise en place de nouveaux fours à zinc pour remplacer les fours de conception ancienne. L’Arrêté, publié le 11 avril 1896, fixe la capacité de l’usine à 13 000 t/an. Cette évolution est très importante à double titre : c’est le premier progrès majeur apporté par la Nouvelle Montagne au système liégeois, mais également l’origine d’importantes difficultés que va connaitre la Société. Elle modernise ses installations, elle construit une centrale thermoélectrique pour permettre l’électrification des usines, une nouvelle poterie équipée d’une presse pour la fabrication des creusets – jusqu’alors le travail étant entièrement manuel –, etc. Pour toutes ces nouvelles installations, des briques sont fabriquées à Chaumont, le hameau de Hermalle-sous-Huy sur la rive droite de la Meuse. La société obtient, en 1900, l’autorisation d’établir, au-dessus de la Meuse, un transporteur aérien pour déverser les cendres des fours à zinc sur un terrain dont elle dispose face aux fours à zinc. Jusqu’alors elle les avait déversées en tas dans une zone située en aval de ses usines. Ce premier transporteur sera détruit et reconstruit en 1906. ![]() Sur la gauche, on aperçoit la ligne des cables permettant le transport aérien des résidus vers Chaumont. « On
raconte que pendant les vacances, les enfants
traversaient la Meuse en barque pour aller ramasser le charbon qui
n’avait pas brûlé (escarbilles). Ils le
rapportaient
chez eux, il servait à se chauffer pendant les mois
d’hiver. Ce travail était aussi
réalisé par
des femmes. Il n’était pas sans danger, et on eut
à
regretter plusieurs accidents mortels lors de ce qui était
une
véritable expédition. »
En 1889, la Nouvelle Montagne complète son domaine houiller en faisant l’acquisition des concessions du Burton, d’Oulhaye et Lurtay (à Sur-les-Bois). Trois ans plus tard, elle réunit, sous le nom de Concession Houillère de la Nouvelle Montagne, l’ensemble de ses concessions d'Engis, Bon-Espoir, Burton [5] et Oulhaye-Lurtay. Elle couvre une superficie de 1 638 ha 33 a 94 c. [AMB-99] Au total, elle extraira 1 300 000 t de charbon de différentes qualités. La vie sociale n'est pas oubliée. La S.A. L’Ouvrier Prévoyant est créée le 31 mai 1895 en vue de faciliter la construction ou l’acquisition de maisons par le personnel ouvrier. Charles Hilgers, ingénieur sous-directeur à Engis en est un des administrateurs. Afin d’éviter aux habitants de La Mallieue de se déplacer jusque Flône pour assister aux offices, la Nouvelle Montagne y fait construire une chapelle. ![]() Carte postale, circa 1903 Dans un article paru en 1901, Adolphe Firket [Inspecteur général des mines], décrivant les installations de la Nouvelle Montagne, termine son article de la façon suivante : «
En résumé, les installations des fours
belges-silésiens à gazogènes et
récupérateurs de chaleur de la
Société
d’Engis, ne méritent que des éloges
sous tous les
rapports. Celles des fours liégeois sont satisfaisantes,
notamment du point de vue des dimensions et de la disposition des
halles et des caves. »
Comme nous le verrons, la situation n’est pas aussi idyllique que ne le laisse penser Adolphe Firket. Entre 1890 et 1899, les résultats explosent et dépassent 1 400 000 fr. Les amortissements sont également plus que doublés tout comme les tantièmes et les dividendes. Malgré ces excellents résultats, la Direction juge la situation de la Société inquiétante. En effet, le marché du zinc est source d’inquiétude et, sur le plan technique, les nouveaux fours posent problèmes. Lors d’une inspection réalisée par un fonctionnaire, la poterie a été très sévèrement critiquée. Aux charbonnages, la situation est devenue tellement mauvaise que l’Administration des Mines, après menaces, classe le charbonnage de la Héna dans la catégorie des charbonnages dangereux et grisouteux ! Cette mauvaise conjoncture n’est pas sans conséquence sur la situation financière. L’exercice de l’année 1900 se solde par une perte, la distribution de dividendes est suspendue. C’est dans ce contexte subitement très difficile que la Direction, pour redresser la situation, fait appel à Louis Fromont à la tête de l’entreprise. Le 15 septembre 1900, il est nommé Directeur Général – Gindorff, qui avait rempli cette fonction jusqu’alors, étant admis à la pension. Cinq jours plus tard, un des nouveaux fours s’écroule après moins d’un an de service ! Il s’avère alors que tous les fours construits depuis 1896 doivent être démolis suite à des défauts de constructions. La Nouvelle Montagne intente un procès à son constructeur. Elle est obligée de laisser les fours effondrés en l’état jusqu’à l’issue du procès, en 1903. Si la situation est catastrophique sur le plan technique, il n’en va pas autrement dans les autres domaines. Confiant dans ses succès obtenus aux Produits Chimiques, Fromont croit qu’une usine à zinc, sous son aspect vétuste, doit être entièrement modernisée. Immédiatement il s’attache à son nouveau défi et entame de nombreux travaux. Il rase les vieux fours, sécurise et modifie la poterie qui menace ruine, prépare la construction de nouveaux fours. Des travaux d’assainissement et de recherches sont réalisés dans les mines. Une nouvelle bure [6] est foncée à Stockay, la bure Grevesse ; il semble qu’elle n’ait pas répondu aux attentes car elle est comblée en 1904. Au cours de l’année 1902, le laminoir est modernisé, il sera prêt à démarrer en janvier 1903 [Origines]. Le 30 octobre 1902, des industriels et des marchands de métaux créent la Société Anonyme des Laminoirs d’Engis [7]. Il est important de noter que la Nouvelle Montagne ne participe pas à la constitution de cette société mais qu’elle lui loue ses laminoirs. Mais le marché du zinc laminé n’est pas bon, les prix sont au plus bas et la concurrence allemande est fort active [Origines]. Afin de maintenir les prix, un accord de limitation de la production est conclu en 1904 entre les lamineurs belges, et la Société des Laminoirs d’Engis obtient un quota de 3 000 T. Par manque de capacité de réduction, en 1902 et 1903, la Nouvelle Montagne fait produire une certaine quantité de zinc par un confrère ; plus tard elle achètera, à la Société de Prayon, 900 T de zinc brut, achat compensé par la livraison de blendes grillées. [8] Par Arrêté Royal du 21 septembre 1903, la Nouvelle Montagne reçoit l'autorisation d’établir 9 nouveaux fours de réduction du zinc. Les premiers des nouveaux fours sont mis à feu en février 1904. Mais tant les anciens fours, qui avaient été reconstruits, que les nouveaux connaissent des problèmes de creusets. Finalement, les nouveaux fours donneront satisfaction. Fromont supprime alors le travail des 24 heures consécutives, qui était de mise, et met en place une organisation du travail par cycle de 8 heures, telle qu’il l’avait mise en place à la Société des Produits Chimiques. [Origines]. Tout va vraiment mal pour la Nouvelle Montagne ! De nouveaux problèmes apparaissent. Tout d’abord, Thiry, chef-laveur aux lavoirs à charbon, est tombé entre une courroie et une poulie et a été tué sur le coup. Encore plus grave, l’ankylostomasie [9] se déclare aux charbonnages et, malgré les mesures prises, le nombre d’ouvriers atteints va grandissant. Fromont fait procéder d’urgence à l’installation d’un lazaret [lieu d'isolement des malades]. Les choses ne s’arrêtent pas là, une campagne est menée contre la Nouvelle Montagne, le député Demblon prononce à la Chambre des Représentants un discours qualifié de mensonger. Le Docteur Malvoz et le député permanent Laboulle se rendent aux charbonnages et agréent le dispensaire qu’ils considèrent comme le plus complet et le mieux installé de la Province, allant même jusqu’à conseiller aux charbonnages d’établir chez eux des dispensaires semblables. Un conflit éclate entre Eugène Regout, qui avait été commissaire réviseur pendant de nombreuses années (il avait résilié son mandat le 12 avril 1902) et la Direction. Dans un livret publié en 1904, Regout s’en prend directement à Fromont. La campagne d’hostilité, à la fois contre la Nouvelle Montagne et les Produits Chimiques, s’intensifie encore et le Conseil est amené à conclure que certains faits ne peuvent être connus que par des indiscrétions. Lors de la séance du 10 janvier 1905, M. Nagelmackers, qui vient de succéder au Baron de Macar, fait au Conseil un historique détaillé de la direction de Fromont, et conclu que la Nouvelle Montagne a reculé car, malgré la hausse du prix du zinc, les ventes de minerais, les nouveaux instruments, « on ne gagne pas plus qu’en 1902 ! ». La réponse de Fromont n’emporte pas l’adhésion du Conseil qui reste convaincu que la campagne de presse, engagée dès 1903, n’a été possible qu’avec sa complicité, et l’invite à démissionner. [Origines] La situation financière est critique, une augmentation de capital de 2 millions de francs, sous forme d’actions privilégiée, est décidée. La Compagnie allemande Beer-Sondheimer & Cie, par ailleurs majoritaire dans la Société Métallurgique de Prayon, souscrit entièrement à l’augmentation de capital. (24 juin 1905). Marcel Nagelmackers reste Président du Conseil, un Vice-Président est nommé – Louis Feist représentant les intérêts allemands et homme de confiance de la Compagnie BeerSondheimer & Cie –, A. Sondheimer est élu Administrateur. Pour remplacer Fromont, les nouveaux administrateurs allemands présentent von Zelewski qui, afin d’uniformiser la gestion, ajoute à ses fonctions de Directeur-Général celle de Conseil aux Laminoirs d’Engis et d’Administrateur aux Produits Chimiques. À partir de ce moment, un courant d’affaires s’établit entre la Nouvelle Montagne et Prayon. Il est intéressant de noter que la Compagnie Beer-Sondheimer possède à ce moment des intérêts importants dans quatre sociétés belges productrices de zinc : Nouvelle Montagne, Société Austro-Belge, Prayon et Overpelt. À elles quatre, elles représentent 25% de la production du sud de l’Europe (l’Allemagne n’en faisant pas partie) tandis que la Vieille Montagne en représente 33%. La nouvelle direction imprime une nouvelle dynamique. D’importants travaux sont entrepris, construction de nouveaux fours, réfection des anciens, construction d’une nouvelle poterie, exploitation de terre à brique le long du Chemin de Fer du Nord, travaux aux mines et aux charbonnages, principalement au Héna où quelques nouveaux gisements ont été trouvés. Dès 1906, des améliorations sont constatées, mais il faut néanmoins attendre 1908 pour que la marche des fours à gaz soit jugée très satisfaisante. [Origines] La quantité de blende grillée est insuffisante. La Nouvelle Montagne et les Engrais Concentrés se plaignent à tour de rôle auprès des Produits Chimiques, l’une de ne pas avoir assez de minerai grillé, l’autre de ne pas recevoir assez d’acide sulfurique. La calamine, devenant rare et couteuse, la Nouvelle Montagne décide d’y renoncer et demande, en 1909 aux Produits Chimiques de construire deux nouveaux fours. Le grillage restera toujours insuffisant si bien qu’en 1911, c’est la Nouvelle Montagne qui décidera à construire 4 nouvelles chambres de plomb. ![]() Publicité
de la Société des Engrais Concentrés,
s.d.
![]() Cette publicité dans le Journal d'Agriculture tropicale fut publiée à au moins 9 reprises en 1911. En 1907, les Engrais Concentrés [10] absorbent la Phosphatière de Fexhe le Haut Clocher. Le 25 juin 1913, le chemin de fer vicinal Engis–Saint-Georges, dont les travaux avaient débuté en 1908, est inauguré. [11] Il permet d’atteindre Fexhe-le-Haut Clocher d’une part, Verlaine et Donceel d’autre part facilitant le transport des phosphates de Hesbaye vers l’usine d’Engis. Ce tronçon sera démonté par l’occupant en 1916 puis ouvert à nouveau le 1er février 1923. ![]() Entrée
en gare d’Engis du train vicinal venant de Hesbaye en 1928.
Le premier wagon est chargé de phosphates à destination de la Nouvelle Montagne. Les mines de phosphates seront exploitées jusqu’en 1932 [12]. Quant à la mine métallique de La Mallieue, elle est la dernière à être exploitée en Belgique. La décision d’arrêter son exploitation sera prise en 1908. En 1912, après avoir acquis les dernières actions en circulation, la Nouvelle Montagne absorbe la Société des Produits Chimiques d’Engis. Les charbonnages deviennent d’exploitation onéreuse et la Nouvelle Montagne les cédera en 1919 à la « Société des Charbonnages du Pays de Liège ». [13] ![]() Ce charbonnage cessera ses activités en 1921. La
Compagnie des
Filles de la Charité organise l’enseignement pour
quelques
dizaines d’enfants dans son tout nouveau couvent, rue de la
Surface, en 1902. Elles quitteront la Mallieue le 30
aout
1921. [14]
![]() Un panneau, dans le haut de la photo, précise « Repas scolaire (…) 1917 à La Mallieue » En 1913, la Nouvelle Montagne construit sur le site du couvent l’hôpital de la Mallieue. ![]() On
voit l'entrée de la salle de fêtes à
droite.
La guerre 1914-18 Le mardi 4 aout 1914, le jour même où les troupes allemandes envahissent la Belgique, von Zelewski fait apposer sur les portes des usines une affiche ainsi rédigée : «
Dans la crise actuelle que traverse la Belgique, beaucoup
d’usines sont obligées
d’arrêter le travail.
Nous portons à la connaissance de nos ouvriers que notre usine à zinc est suffisamment approvisionnée en charbons et minerais pour continuer le travail pendant plusieurs mois. La Direction compte sur la bonne volonté des ouvriers pour pouvoir continuer la fabrication ; il importe à cet effet qu’ils continuent à travailler comme par le passé, en se rendant exactement chaque jour à l’usine. C’est le meilleur moyen pour eux de venir en aide à leur famille dans ces moments difficiles. » Le
Directeur-Général
(s) von Zelewski. La brusque invasion de la Belgique empêche la presque totalité du personnel belge de rejoindre les postes de travail, les usines sont arrêtées, les fours éteints dès le 5 aout, les charbonnages arrêtés le 6 aout. Les stocks n’étaient pas aussi importants que le prétendait von Zelewski. On ne pouvait envisager aucune remise en marche, même partielle, dans l’immédiat. Néanmoins, après un examen approfondi réalisé par l’ingénieur Lepersonne, le Président Nagelmackers donne à celui-ci les instructions et les pouvoirs nécessaires pour la remise en exploitation des charbonnages, l’étude de la remise en marche des différentes divisions : grillage, fours, lavoir, laminoir, et les moyens de préserver de la misère la population ouvrière. Le fonds de roulement sera assuré par les banques Nagelmackers et Fabri, auxquelles s’adjoint Sondheimer. Les charbonnages sont remis en activité le 31 aout, le lavoir en septembre. Le manque de minerai empêche le redémarrage des fours. En octobre on a toutefois pu se procurer du réductif, du coke et des terres pour marcher à allure réduite. La creusetterie fonctionne à nouveau le 26 octobre, ainsi qu’un premier four de 96 creusets ; trois autres suivront de 2 en 2 jours. Les réquisitions par les forces occupantes commencent, d’abord le plomb ; les chambres de plomb de la Société des Engrais Concentrés sont menacées. En avril 1916, les autorités d’occupation enlèvent 1.051 tonnes de cendres plombeuses, ainsi que 35 t de plomb zincifère. En septembre et octobre, elles enlèvent à nouveau 472 t de zinc brut, et plus de 467 t de zinc laminé. Au mois d’aout, le charbonnage de la Mallieue est provisoirement abandonné et la galerie inondée jusqu’à 46 mètres. Les sièges du Héna et Tincelle sont encore en exploitation et des explosifs peuvent être utilisés. La mine métallique de La Mallieue connait encore une très faible activité, seulement une vingtaine d’ouvriers y sont occupés. Mais la situation est devenue dramatique pour le zinc : le minerai sera épuisé dans quatre à cinq semaines. Si la fabrication était arrêtée, un grand nombre d’ouvriers chômeurs serait déportés et de plus, comme ailleurs, les chambres de plomb seraient réquisitionnées. On cherche à acheter le moindre petit lot de minerai, lesquels finalement permettront d’aller jusqu’à la mi-aout ; le zinc est vendu aux pays neutres. Au Conseil du 19 juin 1917, Sondheimer insiste à nouveau sur la nécessité de continuer la fabrication pour éviter la mise sous séquestre, l’enlèvement des chambres de plomb ou la saisie des usines. La menace devient effective au Conseil d’Administration du 22 novembre lorsque le chef de la « Rohstoffverwaltungstelle » [bureau de gestion des matières premières] de Bruxelles, Bernheim, annonce qu’en date du 18 novembre, le Gouvernement Général a nommé l’ingénieur Höchstädter en qualité de Commissaire de Surveillance de la Société et lit une note qui est une mise en demeure : reprise complète du travail – ou séquestre. Après la lecture commentée de cette note, les membres belges du Conseil d’Administration, considérant que leur conscience leur interdit de laisser reprendre le travail, déclare refuser de se soumettre aux injonctions de la Rohstoffverwaltungstelle, et donnent leur démission d’administrateur. Le Docteur Sondheimer déclare alors : «
Monsieur Wreschner et moi déplorons profondément
la
décision grave prise par nos collègues belges de
quitter
le Conseil d’Administration de la Nouvelle Montagne. Il
n’est pas dans nos intérêts de vous
suivre, mais
bien de conserver notre mandat. Nous prenons cette
responsabilité, non seulement dans
l’intérêt
du groupe important d’actionnaires que nous
représentons,
mais surtout dans l’intérêt
même de la
Société qui serait sans cela mise
immédiatement
sous séquestre au détriment de tous les
intérêts sociaux. En agissant ainsi, nous ne
faisons que
remplir notre devoir de mandataires des actionnaires.
Nous espérons que le jour reparaitra où nous travaillerons de nouveau ensemble pour le bien de la Nouvelle Montagne sans que les sentiments nationaux, que nous comprenons et respectons, nous séparent. Attendu que, par votre démission, le nombre des Administrateurs est réduit à trois, alors que les statuts exigent un minimum de sept administrateurs, il sera nécessaire de convoquer de suite une Assemblée Générale pour parer à la situation ainsi créée. » Un conseil de séquestre est installé et le directeur von Zelewski gardera sa fonction jusqu’à la fin de la guerre, moment où il « s’enfuira » en Allemagne. Dès septembre 1914, l’aide au personnel s’organise. Des travaux, non nécessaires pour l’immédiat mais utiles pour l’avenir, sont entrepris, tel le déplacement d’un crassier situé entre le chemin de fer et la grand’ route, le salaire était de 2 fr. par jour. En juillet 1915, la Société obtient l’autorisation de vendre des denrées alimentaires à son personnel à charge d’imputation sur les salaires. D’autre part la Société Coopérative « Comité de secours et d’alimentation de la Province de Liège » est créée par Van Hoegarden, un emprunt de 2.500.000 fr. est réalisé pour subvenir à l’alimentation de la population. Il demande aux charbonnages, mines et métallurgies, de garantir les sommes empruntées à raison de 10 % du capital. Les usines souscrivent, en général, 20 fr. par ouvrier. La participation de la Nouvelle Montagne est de 35.000 fr. Ceci laisse supposer un effectif de 1 725 personnes. Au sortir de la guerre, l’usine d’Engis est à bout de souffle, les installations ont irrémédiablement vieilli, les marchés sont à recréer. Louis Boscheron est appelé à la tête de la Société. Une grève éclate, elle durera du 19 septembre 1919 jusqu’au 11 février 1920. La Nouvelle Montagne opère un dernier redressement. Les engagements de personnel s’intensifient, un certain nombre d’ouvriers provient de la province d’Anvers et, dans une moindre mesure, du Limbourg. La Nouvelle Montagne cède ses concessions charbonnières aux Charbonnages du Pays de Liège contre remise de 1 500 actions nouvelles de cette société. Le siège du Héna était toujours activement exploité. Pour assurer son approvisionnement en matières premières, la société fait l’acquisition de 2 600 parts de la Société Coopérative Union des Usines à Zinc et 316 parts du Groupement Charbonnier Belge. [15] L’Union des Usines à Zinc regroupe l’ensemble des producteurs belges hormis la Vieille Montagne et la Compagnie des Métaux d’Overpelt-Lommel. Cette société coopérative est chargée d’acheter des minerais pour ses membres et éventuellement de vendre du zinc. La Nouvelle Montagne fait également l’acquisition de 641 actions des Engrais Concentrés, société qu’elle absorbera le 13 mai 1924. En 1920, la Nouvelle Montagne entreprend de nouvelles recherches minières à Engis, elles resteront sans résultats. Elle obtient, le 6 avril 1925, de la députation permanente de Liège, l’autorisation d’apporter diverses modifications dans son usine d’acide sulfurique et dans ses laminoirs, d’établir un atelier de préparation et de lavage des cendres plombeuses et d’employer des moteurs et appareils électriques pour le service de ses établissements. À ce moment les installations comportent :
La Situation sociale au début du XXe siècle Dans les années 1920, l’ensemble des usines occupe environ 1 500 ouvriers et employés, pour lesquels une importante organisation sociale se met en place : habitations, sociétés de secours, allocations familiales, hôpital, école, assurances, bâtiment à l’usage de douches consultation des nourrissons, etc. Avant la guerre, la Société possédait déjà de nombreuses habitations tant à la Mallieue, rue Surface, qu’à Engis. Pendant la guerre, l’entretient de ces immeubles a été complètement abandonné. Bon nombre d’entre eux ont été réquisitionnés et occupés par des Allemands. Dans un premier temps, la Nouvelle Montagne rénove de nombreuses maisons et détruit les plus vétustes. À partir de 1924, elle en construit de nouvelles, notamment rue de l’Industrie, elle en possèdera 240, dont des maisons à appartements (rue des Mèches) ; pour l’époque c’était une véritable innovation. Elle transforme des bâtiments en phalanstère [16]. Au moins trois ont existé : un avait été aménagé dans un bâtiment en bois construit à l’occasion du centenaire de la Société, pour cette raison il avait été baptisé au Centenaire, le second se trouvait derrière le terrain de football au 65 rue Vinâve et un troisième près du quai du halage. ![]() Le seul phalanstère subsistant en 2025. Bordant la rue Maréchal Foch, il est photographié depuis la rue Joseph Wauters. À la veille de la Première Guerre mondiale, il n’existait qu’un embryon d’infirmerie, les soins étaient dispensés par un peintre que les circonstances avaient mué en infirmier. Durant le conflit, l’idée a germé d’installer un hôpital répondant aux normes les plus exigeantes de l’époque. Ce sera chose faite en 1927. Dès 1919, l’ancien couvent de la rue de la Surface est aménagé pour recevoir les locaux nécessaires : salle d’opération, salle de visite, cabinets pour les spécialistes, chambres pour les personnes hospitalisées (la capacité de l’hôpital était de dix lits), locaux utilitaires… Le service est assuré par les médecins de la localité, un chirurgien, un médecin spécialisé et un infirmier diplômé attaché à l’établissement. En 1925, en application de la loi du 10 mars 1925, le personnel employé est assuré contre la vieillesse et le décès prématuré auprès de la caisse commune « Intégrale» à Liège. Déjà, quelques années auparavant, les ouvriers, les surveillants et les employés avaient créé une société mutuelle qui sera reconnue par un arrêté royal le 30 novembre 1925. Ses buts principaux étaient :
En 1921, la Nouvelle Montagne reprend l’école que les sœurs de Neufchâtel avaient fondée en 1902 et quittée cette année. Une école gardienne et une école primaire sont installées dans un bâtiment jouxtant l’hôpital. La Nouvelle Montagne est très fière de la méthode d’éducation qui y est appliquée et qui est celle développée par Ovide Decroly, la méthode globale. Des cours de sténographie et de dactylographie sont également organisés. Des enfants qui ont suivis ces cours sont engagés par la Société. L’école sera reprise par la Société de Prayon lorsqu’elle fera l’acquisition de la Nouvelle Montagne. L’école fermera définitivement ses portes en 1970. Les loisirs ne sont pas oubliés ; au lendemain de la guerre, une nouvelle salle des fêtes est construite, remplaçant un bâtiment devenu vétuste qui se trouvait le long de la voie de Chemin de fer. Le 27 septembre 1920, elle obtient l’autorisation d’exploiter un cinéma permanent à la Mallieue, c’est un des plus moderne de la région, l’autorisation sera reconduite en 1926. Chaque semaine des séances cinématographiques sont organisées, les films sont choisis par la société… En hiver des représentations théâtrales sont organisées en collaboration avec la troupe liégeoise « Les Comédiens Liégeois ». Le 11 mars 1928, elle joue Denise d’Alexandre Dumas fils ; le programme spécifie que le spectacle sera terminé de façon à ce que le public puisse reprendre le train de 11 heures qui fait arrêt à La Mallieue vers Huy et celui de 11h27 se dirigeant vers Liège. ![]() Cette salle sert aussi à d’autres occasions ; pour le bal travesti le 25 janvier 1931 avec l’ancien orchestre-jazz du Moulin Rouge de Paris, le prix de l’entrée est fixé à 4 fr pour les hommes, 2 fr pour les dames et 1 fr pour les mamans ! À l’occasion d’une grande soirée de gala, le 5 mai 1932, une conférence est prévue sur le thème : l’alimentation de la plante – engrais ; la conférence est suivie d’une pièce en wallon « Qui est-ce qu’est l’maisse ? », d'un concert et cette soirée se terminera par un grand bal. Cette salle est également utilisée pour des évènements plus officiels: remise des prix aux enfants de l’école, remise des décorations aux personnels … À partir de 1925, des ouvriers venant d’Italie sont embauchés ; par la suite, des ressortissants d’autres nations seront également engagés, mais les Italiens seront toujours en plus grand nombre. Au cours de l’année 1927 des tensions apparaissent. Elles se marquent par un nombre important de travailleurs prestant des périodes très courtes, moins d’un mois ! Les syndicats, bien que moins présents dans les usines à zinc situées à la périphérie du bassin, attaquent violemment la Direction de la Nouvelle Montagne. Ils décrivent des conditions de travail catastrophiques : salaire de misère, non-respect de la loi des 8 heures, voies de fait de la part des gardes. [17] Au niveau de l’ensemble des usines à zinc du bassin, des négociations sont ouvertes concernant des augmentations de salaire, il est question d’une augmentation de 5 %. À la Nouvelle Montagne, les salaires n’ont plus été augmentés depuis 1924. En mars 1928, 5 % sont accordés aux ouvriers des fours à zinc et 4 % à ceux des Engrais Concentrés. Mais à la préparation des minerais, ceux du « Vapart » [18], ne les reçoivent pas sous prétexte que précédemment ils avaient obtenu 3 fr/jour en compensation de travail supplémentaire qu’ils devaient effectuer ! Tous les ouvriers occupés au Vapart remettent leur préavis. Après de nouveaux pourparlers, ils obtiendront également l’augmentation de 5 %. À la lecture des livrets d’ouvrier apparait un phénomène, qui aujourd’hui [19], serait jugé comme un manque de loyauté vis-à-vis de l’entreprise : certains ouvriers quittent l’entreprise et y reviennent à de nombreuses reprises. Au niveau national, les syndicats revendiquent, pour les ouvriers des fours à zinc, un abaissement de l’âge de la retraite à 55 ans. Ils justifient leur demande en arguant des conditions de travail extrêmement pénibles que connaissent ces travailleurs. Pour ne pas rencontrer cette revendication, le Ministre Heyman argumente que celle-ci soulève cependant une difficulté à savoir l’importante diminution du montant des rentes qu’entraine mathématiquement l’abaissement de l’âge d’entrée en jouissance de la pension de vieillesse. La réponse du journal « Le Prolétaire » (30-12-1927) : «
À cette objection une réponse
immédiate est
nécessaire, c’est que les ouvriers des usines
à
zinc – cela est prouvé par les statistiques
citées
par le citoyen Wauters au Sénat lors de la discussion sur la
loi
des huit heures – ne vivent pas jusque 65 ans et par
conséquent ne profitent pas des versements qu’ils
ont
faits eux et leurs patrons. Donc la réserve
mathématique
ne doit pas être aussi élevée pour les
travailleurs
de l’industrie du zinc, en raison du degré de
mortalité existant. »
Cette revendication ne sera jamais rencontrée. Catastrophes ![]() Vue
d’une partie des installations lors des inondations de 1926.
Le site de L'Institut Royal Météorologique indique en 2025, dans sa liste d'évènements remarquables depuis 1901 : « Les pluies extrêmement abondantes depuis le 19 décembre, conjuguées à la fonte des neiges accumulées depuis la fin novembre 1925, produisent une crue exceptionnelle de la Meuse et de ses affluents. Durant la nuit de nouvel an, la crue de la Meuse atteint son paroxysme. À Liège, son débit se situe à 3500 m³ par seconde, alors que la moyenne annuelle du fleuve à cet endroit est de 250 m³ par seconde. Suite à cette crue exceptionnelle de la Meuse et ses affluents, toutes les villes de la vallée Mosane sont sous eau. À certains endroits, comme à Seraing, le niveau des eaux atteint le premier étage des habitations. Par l'ampleur des dégats qu'elle entraine, c'est, sans conteste, l'une des trois inondations les plus catastrophiques du siècle qui ont touché la vallée de la Meuse (les deux autres étant celles de décembre 1993 et janvier 1995). » Engis est envahie ! L'eau atteint la rue Maréchal Foch, quasiment au sommet de la rue de la station... ![]() La Nouvelle Montagne fête son centenaire C’est le 28 juin 1929 que la Société fête son centenaire en présence du prince Léopold, futur roi des belges, et du ministre de l’Industrie et du Travail M. Heyman. L’escorte royale, se rend de Bruxelles à Engis par chemin de fer, non sans s’être arrêtée à Liège pour embarquer un certain nombre de personnalités liégeoises. À la gare d’Engis, la suite princière prend place dans deux rames de wagons du Nord-Belge ; celles-ci, tractées par des locomotives de la société, conduisent la suite jusqu’au laminoir à la Mallieue. L’accueil réservé par la Société a lieu dans la cour devant l’hôpital et les écoles. [20] Parmi les nombreuses personnalités présentes, il est à remarquer que toutes les sociétés produisant du zinc en Belgique sont largement représentées. Les installations des fours et du laminoir sont au programme de la visite, les différentes opérations de construction d’un four et de son exploitation font l’objet d’explications approfondies. ![]() Pompiers et gardes sont en tête du cortège descendant la rue de la Surface. Suit le futur roi Léopold III à côté de MM. Nagelmackers et Bocheron. La Darne de Saumon à la Parisienne
Le Filet de Bœuf Godart, Pommes nouvelles La Poularde Glacée Belle-Vue et sa Salade Printanière La Gâteau Léopold Le Café Les vins Bordeaux blanc – Gravier supérieur Bordeaux rouge – Saint-Génois Champagne La fête sera de courte durée, la crise de 1930 se profile. Dès le début de l’année des fours sont mis à l’arrêt. Si, le premier janvier, 24 fours sont en activité, il n’en restera que 5 fin avril. Et en octobre il est question d’une diminution de 5 % des salaires alors qu’ils avaient été augmentés de la même valeur l’année précédente. L’année se solde néanmoins par un résultat positif. La chute des cours du zinc se poursuivra en 1931. Le lundi 1er décembre 1930, un brouillard très épais apparait en différents endroits de Belgique. Dans la vallée de la Meuse on constate également que les fumées s’échappant des cheminées des usines se rabattent vers le sol (phénomène d’inversion des températures aujourd’hui bien connu). Le brouillard disparaitra dans le courant de la journée du 5. Quelques heures après l’apparition du brouillard, dans toute la vallée depuis Seraing jusqu’à Huy, des centaines de personnes sont atteintes de différents problèmes respiratoires, ces symptômes apparaissant quasi simultanément. Le bétail présente également des symptômes analogues. Au cours des journées des 3 et 4 décembre une soixantaine de personne décèdent. Les communes les plus atteintes sont celles de Flémalle, Engis et Hermalle. Ceci s’explique alors par la présence d’usines importantes, la Nouvelle Montagne et la Vieille Montagne à Flône, et par le fait qu’à cet endroit la vallée se resserre, ceci augmentant la concentration en contaminant. ![]() Dimanche 7 décembre 1930 : La
reine
Élisabeth sur les lieux de la catastrophe
au moment où elle croise le cortège funéraire d’une des victimes. À l’arrière-plan on devine les installations de grillage de la Nouvelle Montagne. Ce phénomène fait grand bruit à l’étranger, surtout en Angleterre où plusieurs régions sont régulièrement confrontées à d’importants brouillards. La Société des Nations elle-même s’inquiète et sa section Hygiène demande au gouvernement belge de lui adresser un rapport complet sur ce qui a frappé les habitants de la vallée de la Meuse. Aujourd’hui encore cette catastrophe écologique, la première identifiée, marque la mémoire collective. Et des recherches récentes tendent encore d’identifier tous les éléments ayant provoqués cet évènement. Le déclin Les conditions de marché sont mauvaises dans tous les domaines d’activité de la Nouvelle Montagne : zinc, zinc laminé, acide sulfurique et engrais. Il y a notamment l’interdiction d’exporter de l’acide sulfurique en Allemagne. D’importantes difficultés sont également rencontrées en agriculture. Les épreuves de la guerre n’ont pas permis à la Nouvelle Montagne de retrouver assez de vigueur pour pouvoir surmonter la crise économique de 1930 qui sera suivie d’une crise sociale en 1936. Le 1er septembre 1932, la Nouvelle Montagne contraint son personnel à opter entre le congé immédiat ou une diminution de 20 % de sa rémunération. [21] Nombre de membres du personnel supérieur sont congédiés, Bocheron a quitté la Société. Malgré cette période troublée la Nouvelle Montagne poursuit ses recherches pour améliorer et développer ses activités. Elle renouvelle pour un an l’autorisation d’exploitation de sa division des Engrais Concentrés, elle l’obtiendra ensuite pour une période de 18 ans. Elle dépose, au cours des années 1931 à 1933, plusieurs brevets, non seulement en Belgique, mais également dans d’autres pays tels la France, les États-Unis… Trois de ces brevets concernent un procédé de préparation des blendes en vue de leur supergrillage. Le supergrillage consiste à griller du minerai en vent soufflé ou aspiré, cette façon de procéder permettant d’obtenir un meilleur rendement d’oxydation des sulfures. Un autre brevet porte sur une amélioration de la valorisation des poussières de zinc récupérées dans les allonges. Jusqu’à ce moment, la Société a été très active dans le développement de ses procédés. Mais, à partir de 1933, elle semble ne plus en faire une de ses priorités. ![]() Vue
des derniers fours à zinc de la Nouvelle Montagne
La Nouvelle Montagne accumule des pertes importantes. Ses installations sont obsolètes et sa production est la plus faible de Belgique avec seulement 14.000 T. de zinc en 1936 et 1937. La demande de zinc de haute qualité, produit par électrolyse, est de plus en plus importante. Le marché du zinc laminé devient de moins en moins rémunérateur. Les difficultés d’exportation toujours plus grandes et des entraves créées par le gouvernement conduisent les producteurs de zinc laminé à envisager le rétablissement d’une entente. Le 21 janvier 1936, un projet élaboré par la Société de Prayon est approuvé par toutes les sociétés concernées, à l’exception de la Nouvelle Montagne qui discute principalement le coefficient qui lui est réservé. [22] Le 31 juillet, pour éviter la rupture de cette entente, il est convenu que tous les lamineurs fassent l’acquisition de titres de la Nouvelle Montagne. Des tractations ont lieu entre les membres de l’entente. Finalement et très habilement, lors d’un Conseil d’Administration tenu le 8 décembre 1937, Prayon décide définitivement de reprendre la Société de la Nouvelle Montagne. Les buts qu’elle poursuit en réalisant cette opération sont de faire disparaitre un concurrent, de s’assurer une place importante dans le marché du zinc laminé, de faire un pas dans la rationalisation de l’industrie du zinc en Belgique et de disposer d’une capacité qui pourrait être facilement arrêtée en période de basse conjoncture pour préserver l’activité de l’usine de Trooz. Officiellement, l’acquisition de la Nouvelle Montagne est proclamée en 1938. Prayon annonce à cette occasion son intention de maintenir les usines d’Engis sous l’appellation « Siège Nouvelle Montagne ». L’activité de l’usine d’Engis est intégrée dans les comptes de Prayon à partir du premier semestre 1938. L’usine de la Meuse retrouve ainsi celle de la Vesdre, dont elle avait été séparée pendant plus d’un demi-siècle. L’entente étant réalisée au sein des producteurs de zinc laminé, Prayon décide d’acheter deux nouveaux trains de laminoir pour son usine de Trooz. Elle rationalise ses activités ; les fours à zinc et le laminoir d’Engis sont définitivement arrêtés. Les installations de grillage de blende sont modernisées et agrandies, les fabrications d’acide phosphorique et d’engrais vont être développées. Notes[1] Moniteur belge du 22/05/89.![]() [2] Ce procédé est basé sur la chimie découverte plus de 50 ans plus tôt par Fresnel mais la technologie de l’époque empêchait sa mise en œuvre industrielle. ![]() [3] Heinrich Albert, le fondateur de la société ChemischeWerkevorm H. et E. Albert, a eu comme professeur à l’université de Munich Justus Liebig. Il débuta la production d’engrais au départ de déchets d’abattoir le 1er octobre 1858. Avant la Première Guerre mondiale, sa société employait près de 2 400 ouvriers et avait plus de 30 succursales tant en Allemagne qu’ailleurs en Europe. Le procédé de fabrication des superphosphates doubles daterait de 1871 ! ![]() [4] Unité utilisée par les professionnels pour exprimer la teneur en phosphore des engrais. ![]() [5] Burton : un article de presse de 1935 situe le Burton en face du pont d’Hermalle et exploité par la Vieille Montagne ( ?). Dans ce même article : « Le Burton fut fondé par la famille Pasquet de Gilly-lez-Charleroi, puis repris par M. Noiset, dont un puits de St-Georges a porté son nom. » Ce charbonnage est le type des premiers charbonnages, parce que les eaux étaient évacuées par un « sèwe ». C’est le ruisseau qui coule encore de la galerie. ![]() [6] Bure vient de « bûr » en langue germanique et signifie maison devenu en wallon liégeois « beûr », et désigne l’abri qui recouvre le puits. ![]() [7] G.F. 1906. ![]() [8] Rapport du Conseil d’Administration du 21 mars 1904 de la Société de Prayon. ![]() [9] Ankylostomasie (dite ankylostomiase au XXIe siècle) ou anémie des mineurs. Parasitologie, pathologies infectieuses et tropicales. Maladie qui s'observe essentiellement dans les régions tropicales, provoquée par la présence dans l'intestin d'un ver parasite : l'ankylostome (Ankylostoma duodenale). Les ankylostomes pénètrent dans l'organisme à l'état de larves, surtout par la peau. Parvenus dans l'intestin grêle, ils se fixent sur sa muqueuse, en provoquant de nombreuses petites hémorragies responsables de l'anémie. Cette maladie atteint nos mineurs en 1890. ![]() [10] À ce moment, les Engrais Concentrés occupent 320 ouvriers. (1909). ![]() [11] La Société Nationale des Chemins de Fer Vicinaux (S.N.C.V.) avait été créée en 1888 afin d’établir un réseau complémentaire aux grandes lignes qui existaient en Belgique. ![]() [12] Pour occuper son personnel, la Société de Prayon en reprendra l’extraction pendant la Deuxième Guerre mondiale. ![]() [13] L’exploitation sera arrêtée en 1928. Le charbonnage de « la Surface » quant à lui a cessé ses activités dès 1921. À la Surface, du charbon de très mauvaise qualité sera encore extrait par la population pendant la seconde guerre mondiale. En 1943, le puits de la Héna sera obturé d’une dalle surmontée d’une borne. ![]() [14] Informations fournies par la Compagnie des Filles de la Charité à Bruxelles. ![]() [15] GF 1921. ![]() [16] L’idée du phalanstère revient à Charles Fourier, philosophe français du XIXe siècle, fondateur de l’École Sociétaire. Il l’imagine comme un bâtiment de très grande taille où chaque famille a un logement privé et dispose d’espaces de vie collective. Dans le cas présent, il s’agit plutôt de dortoirs avec salle commune. ![]() [17] Le Prolétaire, 11 février 1928. ![]() [18] Il s’agit en fait du nom d’un broyeur fabriqué à Liège. Une rue porte encore son nom. ![]() [19] Nous portons cette appréciation sur la culture d’entreprise que nous avons connue au sein de la Société de Prayon qui succéda à la Nouvelle Montagne à Engis. ![]() [20] Un bâtiment en bois, construit pour cet événement, subsista jusqu’à la dernière guerre. ![]() [21] M.M.I.L. dossier Musch-Beeckman. ![]() [22] Rapport du C.A. de Prayon du 4 octobre 1935. ![]() Bibliographie[LNM] « La Nouvelle Montagne » dans Bulletin mensuel Negelmackers Fils et Cie, mars 1930.![]() [MB-05/89] Moniteur belge, 22 mai 1889. ![]() [MB-10/91] Moniteur belge, 17 octobre 1891. ![]() [AMB-99] Annales des Mines de Belgique, 1899. ![]() [Origines] Les origines de la « Nouvelle Montagne », anonyme, collection privée. ![]()
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